Opération Dragon, où il était une fois Bruce Lee en Amérique.

Publié le par Nostalgic-du-cool

Opération Dragon (au départ Blood and Steel, modifié en Enter the dragon par la suite) est le premier film de B. Lee financé en grande partie par une compagnie américaine, la Warner (outre les séries comme le frelon vert, déjà tournées aux USA), raison pour laquelle ce film n'est jamais présent dans les coffret DVD consacré à l'artiste martial (les droit n'appartenant pas aux même sociétés...). Il a bénéficié d'un budget assez réduit (comparé aux productions US) et d'un casting important : John Saxon, Jim Kelly, Bob Wall et Kien Shih (entre autres) viennent lui prêter main forte, et le concurrencer par la même occasion à la tête de l'affiche. Il occupe tout de même le rôle central, celui de Lee, jeune artiste martial envoyé au concours qu'organise Mr Han sur son île privée pour y découvrir la raison (et venger par la même occasion) de la mort de sa soeur.

Production américaine oblige, on ne retrouve pas le style insufflé par B. Lee à ses films précédents, même si on sent son influence un peu partout dans le film. La thématique du film d'espionnage, par exemple, est ajoutée à ce que Lee faisait précédemment. On retrouve par contre moins l'aspect philosophique que l'acteur voulait insuffler à ses films, auquel les producteurs ont préféré des scènes de combats très bien fignolées et filmées ! Ces plans d'actions vont crescendo dans le film, pour aboutir dans à la très célèbre et excellente scène des miroirs, dont on chantera les louanges plus tard.

Passons tout de suite à un petit résumé de l'histoire : Lee est un jeune combattant formé au temple de Shaolin, envoyé par ledit monastère pour élucider le meurtre de se soeur sur une ile, sur laquelle Han, un milliardaire dont la fortune est basé sur divers trafics, organise tous les trois ans un tournoi d'arts martiaux. Il s'y fait inviter, en même temps qu'un américain en manque de  liquidités et un noir en fuite. Plutôt qu'invités disons retenus sur cette île sous haute sécurité, mais ou leur hôte leur fourni tous ce dont il pourraient avoir besoin, y compris pour les plaisirs de la chair... Cependant l'ambiance ne tarde pas à devenir électrique lorsque Han se rend compte que les combattants ne viennent pas que pour son tournoi, et que ses gardes se font agresser... Il affrontera ainsi Williams (J. Kelly), agent envoyé par la Grande Bretagne pour détruire son organisation criminelle, attaquera Lee et Roper, et précipitera ainsi sa chute lors de son duel face au petit dragon, griffe contre poings.

 

Ce qui frappe d'entrée, bien sur, c'est la présence de Bruce Lee, son charisme, sa présence, son aura, qu'on lui donne le nom qu'on veut, on la ressent dès son apparition à l'écran. Déjà soulignée dans les autres articles consacrés à ses films ou à sa vie, cette présence est encore plus manifeste dans ce film. On a envie de dire, "j'aime ce film juste pour B. Lee", peut importe le scénario. Comme cela à déjà pu être dit dans bien d'autres articles de blogs traitant de ce film, ce dernier se rapproche plus de la série B que du blockbuster ou du chef d'oeuvre de mise en scène et de profondeur de réflexion. Mais il y a Bruce lee. Pour qui aime les films d'actions cela signifie tout. La présence de ce nom dans un générique et à l'écran, la perspective de combats superbe justifie et autorise un scénario léger qui passe pour le coup en arrière plan et ne sert que de trame aux prouesses technique de l'acteur. On se demande d'ailleurs ce que vaudrait le film sans Lee, puisque ce dernier occupe littéralement l'écran, rend le scénario obsolète tant on se moque de l'histoire, attendant juste les scènes de combat et les apparitions de dragon. Tout autre acteur aurait relégué ce film au rang de navet (au mieux de nanard), en tous cas aux oubliettes, et n'aurait même pas permis au producteur de rembourser son budget. Rappelons qu'il a rapporté des millions de dollars à la Warner (20 fis le budget de 400 000 $).

Et puis derrière Lee il y a John Saxon et Bob Wall, qui incarne très bien leur personnage, surtout Wall, éternel rival et battu face à Bruce Lee, qui réussi encore à nous servir un bras droit haut en couleur et cruel a souhait, construit en opposition (physique et morale) avec Lee. (Il est grand et costaud, cruel et use de sa force tant qu’il peut alors que Lee est petit, fin, et le bat en utilisant sa technique hors du commun dans une scène d’anthologie ou il anticipe les coups et l’achève avec un enchaînement très connu (présent dans Tekken par exemple !).

Un autre aspect du film est intéressant, par delà les combats et la mirifique technique du petit dragon, et c’est l’aspect « politique » du film (au sens large). Un chinois fait en effet son apparition dans un film américain. Il y a un noir aussi, que l’on voit d’ailleurs s’entraîner avec les blacks panthers, qu’il soutient. Le film montre donc certains aspects de la société qui était cachés, occultés auparavant, surtout dans les films d’actions, encore très tourné vers l’opposition Est/Ouest, surtout en cette période de guerre du Vietnam (en 73 les américains quittent d’ailleurs le pays). Lee pouvait donc être perçu, dans l’imaginaire occidental et incapable de faire la différence entre les différents peuples d’Asie comme le « Jaune », « le Vietcong ». Mais il est opposé à un autre asiatique, et pas à un milliardaire européen ou américain. Il est au contraire aidé par les participants blancs et noir du tournoi. Peut être une différenciation entre « bon » et « mauvais » « jaune » ? On pourrait en extrapolant beaucoup le penser, mais je n’irais pas jusque la. Autre préjugé racial, celui, déjà évoqué, de l’entraînement « caché » des noirs (qui appartiendrait pour leur majorité aux blacks panthers…) à des sports de combat, sans doute en vue d’un renversement du pouvoir par la force. Fantasme lié aux revendications égalitaristes de cette décennie par les minorités noires.

Parlons un peu maintenant de la scène finale, celle des miroirs, où Lee affronte Han à mains nues alors que ce dernier est armé d’une griffe. Affrontement inégal donc, et où le milliardaire, apeuré, agit plus d’une fois lâchement, blessant même Lee par surprise. Bien sur ce dernier finit par triompher, dans une salle emplie de miroirs, de son terrible et vicieux adversaire qui tentait, par le jeu des reflet de le tromper. Jeu que Lee refuse, en brisant les glaces, ce qui lui permet de prendre son adversaire à son propre jeu et de le tuer. Une analyse plus détaillé ici.

Sur la qualité du film : Il y a différentes approches, qui le place sur un piédestal ou au contraire le donne comme le pire de Lee. Film pouvant être vu comme une marche supplémentaire dans la starification du jeune acteur, une marche vers l’aboutissement de sa volonté, un pont entre la culture qu’il a apprise en vivant dans l’ouest Etatsunien et celle de sa patrie, la Chine, Honk Hong, un étape importante de sa carrière et de sa reconnaissance internationale. Lui-même considérait ce film comme très bon et important, délaissant même le projet Death game pour le tourner. L’autre vision (je bipolarise sciemment les opinions, mais il existe bien sur une infinité de nuances…) est celle qui voit dans ce film un détournement de Lee par l’ethnocentrisme américain, par la machine a fric qu’est la Warner, l’utilisation néfaste de sa figure à des fins pécuniaires et surtout une entorse à la volonté du petit dragon, à sa conscience nationale (déjà évoquée dans La fureur du dragon). Ce qui est sur c’est que ce film, réalisé par Robert Clouse (pardon pour ceux qui cherchait le nom du réalisateur en début d’article !), n’est pas tout à fait à l’image du précédent (Lee, malgré son aura et son perfectionnisme ne peut influencer le film au point de lui donner la philosophie qu’il commençait à mettre dans ses films), et que beaucoup de fans auraient sans doute préféré qu’il termine Le jeu de la mort au lieu de se lancer dans ce projet, dont il ne verra finalement pas le succés. Quoiqu’il en soit, Enter the dragon fait partie intégrante de l’œuvre de Lee, et ne doit pas être mis à l’écart sous prétexte de financement et de direction américain. L’acteur Honk-hongais l’avait accepté, le soutenait et s’était consacré à lui comme à l’un de ses propres films. Il ne l’a pas renié, et doit donc être considéré comme tel par le spectateur. Son dernier vrai film, ses presque dernières apparitions à l’écran, donc un film à intégrer pleinement dans sa filmographie, et à une bonne place.

Carcharoth



Publié dans Chine et HK

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S
J'adore Bruce Lee depuis enfant ,c'est devenu un mythe en tant qu'acteur mais aussi en tant que maitre ds son art martial. Ce que tu as écrit je trouve que tu l'as trés bien tourné , bravo à toi :-)
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