Tetsuo : the Bullet Man de Tsukamoto (2010), troisième variation.

Publié le par Nostalgic-du-cool

 

Tetsuo : The Bullet man, Shinyia Tsukamoto, 2010, Japon.





Tetsuo volume III, le dernier né de Shinyia Tsukamoto est une nouvelle variation de son mythique premier moyen métrage Tetsuo (the iron man). Si ce film désormais mythique était peut être conçu pour réveiller le cinéma japonais (qui dans les années 80 était un peu apathique), cette troisième version tournée en anglais est là pour conquérir l'international. Sélectionné à la Mostra de Venise, il y a reçu un accueil plus que mitigé pour ne pas dire très critique. Mais qui se souvient, depuis Phatom of Regular size et Tetsuo (1986 et 1988) que la critique n'ait jamais réservé à Tsukamoto un accueil triomphant ? Elle n'a jamais reconnu le réalisateur qu'après coup, sous la « pression » des fans, en lui accolant les épithètes « auteur » et « cyberpunk » qui pourtant lui collent assez mal ! Il en va de même pour ce volet de la désormais trilogie Tetsuo, qui signe la sortie de Tsukamoto de l'univers cyberpunk (à moins qu'il ne décide plus tard de revisiter le genre à sa façon?).

IFC Films


Anthony (Eric Bossick) est né d'un père américain et d'une mère japonaise qu'il n'a pour ainsi dire jamais connue. Il est marié à une japonaise dont il a eu un fils. Un beau jour, alors qu'il revient de chez son père, il assiste impuissant à l'assassinat de son fils. Sa femme ne pense alors plus qu'à se venger, tandis-que son père lui conseille de garder son calme. Il comprend vite que ce meurtre de sang froid a un rapport étroit avec les activités anciennes de ses parents. Il découvre qu'il est le fruit de technologies expérimentales, et que la colère peut lui être fatale. De fait, il se transforme peu à peu en un monstre technologique, The Bullet Man. Son adversaire, un terroriste nihiliste et suicidaire, ancien chercheur et ami de son père espère le voir détruire le monde en lui causant le plus de douleur possible.

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On le voit, Tsukamoto place son héros dans un cadre familial assez conventionnel, ce qui est inhabituel chez lui, et introduit directement des concepts psychologiques comme un fort complexe d'oedipe, alors qu'auparavant il laissait s'exprimer ses idées surtout via les images et le son. On a l'impression cette fois ci que le couple présenté à l'écran n'est pas lié charnellement, ce qui ôte un peu de sa substance vivante au film. Cette façon d'amener la réflexion, moins viscérale et sensitive qu'avant est l'une des clés de ce nouveau film, et l'une des chose qui le font s'éloigner du reste de sa filmographie.


Tetsuo est un film qui sera sans doute une charnière importante dans l’œuvre de Shinyia Tsukamoto. Il passe à la caméra numérique (ce qui pourra occasionner des expérimentations visuelles dans ses prochains films), n'hésite pas à multiplier les auto références (Nightmare détective pour le costume, Bullet Ballet, bien sur les deux premiers Tetsuo, …) ce qui est révélateur d'une phase de transition (comme le note Tom Mes ici, faisant aussi un intéressant parallèle avec Takashi Miike) dans sa manière de concevoir ses films. En tant que tel, The Bullet Man est une œuvre qui n'a manifestement pas ravie les fans de la première heures, les tenants du cyberpunk et de l'expérimental en noir et blanc ; pas plus qu'elle n'a satisfait les cinéphiles « conventionnels », les critiques où le large public auquel pourtant elle se voulait accessible grâce à des dialogues plus explicatifs, qui évoquaient les thèmes fétiches du réalisateur, grâce à une absence de scène érotique, à la distribution à l'international et aux fameux dialogues en anglais (première chose qui revient partout, à croire que le film n'est intéressant que par cet aspect!). Mais non, Tsukamoto n'est pas fait pour cela, et après tout ce n'est peut être pas un mal, puisqu'avec son Kaiju Theater (sa maison de production) il est connu par des groupes de fans dans à peu prêt tous les pays du monde et a un succès d'estime important, même si la diffusion laisse parfois à désirer...

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Je pense donc qu'il faut vraiment voir dans Tetsuo The Bullet Man un film de transition, une parenthèse dans la filmographie de Tsukamoto et ce même s'il se rattache directement aux deux autres Tetsuo et est dans la continuité de l'évolution entamé dans Bodyhammer (Tetsuo II). Il reste pour moi une version plus moderne et américanisée (ce n'est pas pour rien qu'il s’agit d'un homme-arme, thématique chère au pays des plus gros complexes militaro-industriel) de ce dernier. Il sera par contre intéressant de voir quel sera le thème de son prochain film ; une autre variation auto référentielle ou au contraire une nouvelle évolution de son style. Évidemment on espère voir se réaliser la seconde hypothèse, qui laisse à la création de Tsukamoto une plus belle part, ce qui ne peut manquer de faire rêver quand on voit Vital, A snake of June ou Haze...



Carcharoth


La fiche Imdb.



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