Big Boss : coup d'essai, coup de patron !
Nous sommes en 1971: Bruce Lee, qui vient de tourner dans quelques navets et séries B américaines, revient à Honk Hong et s'engage pour deux films auprès de Raymond Chow et sa compagnie, la Golden Harvest, avec un cachet de 15 000 $ par film. D'abord pressenti pour joué dans La main de fer, il tournera finalement sous la direction de Lo Wei dans un film dont le titre est prémonitoire: Big Boss. En quatre semaines d'exploitations, il atteint trois millions quatre-vingt-dix-sept mille dollars HK. Record jamais atteint par un film chinois à l'époque.
Tout n'avait pourtant pas si bien commencé: Le tournage, qui se déroule en Thaïlande, se passe très mal au début: mauvaise nourriture, réalisateur incompétent, blessure de Bruce Lee à la main... R. Chow décide alors de remplacer Wu Chia Hsiang par Lo Wei, vénérable réalisateur. Le contact ne passe pas tout de suite, mais bientôt B. Lee reconnaît les qualités de ce dernier, qui lui permet de modifier le réalisateur et de développer son rôle, qui surpasse alors celui de James Tien (Hsiu Chien). Les combats sont réglés par Han Yingjie, qui joue aussi Hsiao Mi (le Boss), grand maître des combats de l'époque. Le Jeet Kune Do semble marcher avec ses conceptions des combats et Bruce Lee apprend beaucoup à son contact. Il se foule néanmoins la cheville, le dernier jour, lors de la scène finale: d'ou la fin, ou Cheng renvoie le couteau dans le ventre du Boss d'un coup de pied, alors qu'il est a genou !
Exténué, il rentre a L.A. pour tourné une série américaine, loin de se douter que ce film connaîtra un quelconque succès !
Tournage épique en Thaïlande, malchance, avaries de toutes sortent, le film a été produit cahin-caha, et le style n'est pas encore vraiment la: Combats irréalistes, histoire parfois bancale, post-synchronisation de la voix de Lee (qui ne parle pas mandarin, alors que le film est tourné dans cette langue: ce n'est donc pas sa vrai voix !) etc...
Néanmoins B. Lee donne tout ce qu'il a et en profite pour perfectionner son art, et commence à mettre en oeuvre dans le scénario certaines de ses idées.
Dans ce film, l'histoire qui est racontée est celle de Chao Cheng, jeune homme bagarreur que sa famille envoie en Thaïlande afin de le remettre dans le rang, en le faisant travailler avec son oncle, dans une fabrique de pains de glace. Tout se passe plus ou moins bien, Chen assiste à plusieurs combats, ou un individu se retrouve seul face à un groupe de malfrats, mais ne peut intervenir a cause du serment que lui a fait prêter son oncle: dilemme cornélien pour ce défenseur des opprimés et de la justice: devants ces combats iniques, il est tout prêt d'intervenir, mais apparaît alors Chien, un parent de son oncle, très bon combattant, défendant les même valeurs... Une amitié commence à naître, d'autant plus qu'ils travaillent et souffrent ensemble. Des liens très forts naissent aussi entre Chen et Mei, qui vit avec lui chez son oncle... Cependant, un jour, un ouvrier fait une erreur alors que tous les autres sont partis: un pain de glace tombe et se brise, révélant un sachet de drogue. Il est alors emmené, avec ceux qui ont assisté à la scène chez le Boss, qui les fait tuer. Inquiets de cette disparition, les autres ouvriers manifestent au fil des jours de plus en plus de mécontentement, et ce jusqu'a un affrontement avec le contremaître et des ouvriers autochtones à la solde de patron (chinois/Thaïlandais donc). Chen (Lee) est déterminant et fait pencher la balance du coté des ouvriers: appelé par le boss, il est nommé contremaître pour calmer les esprits, et obtient du chef qu'il contacte enfin la police pour signaler les disparitions. Il ne sait pas encore que ce dernier graisse la patte de tous les fonctionnaires locaux. Cette nomination créée avec le reste de la communauté une distance, et il se sent rejeté par ses amis. Devant l'absence de résultat concernant la disparition des deux chinois, Chien (James Tien) décide d'aller directement chez le boss pour le forcer à prouver qu'il fait bien quelque chose... Pendant ce temps, ce dernier, avec son fils, s'entraîne au kung-fu en massacrant de pauvres ouvriers. Il fait vite disparaître leurs cadavres avant de recevoir Chien et son acolyte. Voyant que celui ci menace, et risque donc de découvrir le trafic auquel il se livre, le boss le fait tuer. On assiste à ce moment la du film, au premier véritable combat structuré (le précédent étant plus une bagarre général qu'autre chose), où Chien et son ami combattent bravement mais finissent par céder face au nombre et au déséquilibre des armes: pieds et mains contre masses et couteaux...
Le boss n'en reste pas la: il attire Lee, et fait assassiner pendant leur sommeil tous ceux chez qui il dormait. Découvrant cela, Lee, bouleversé, va enquêter dans la fabrique de glace: il découvre le trafic, mais est repéré: deuxième combat du film, ou Chen dévoile un peu plus son style et surtout ses capacités: après cela il se rend chez le Boss et l'affronte avec ses nombreux gardes, en profitant pour libérer les prostitués qu'il retient prisonnières...
Le dernier combat est bien sur épique, long irréaliste au possible mais déjà précurseur du style de B. Lee... Hsiao Mi se révèle encore plus fourbe et lâche qu'auparavant et use de tous les artefacts possibles pour tuer le courageux Chen, exténué par tous ses combats. La victoire lui revient finalement, par la procédé que l'on sait... Vainqueur mais malheureux d'avoir perdu tous ses amis, il rentre chez lui en Chine...
Premier film réellement bon de Lee (excepté peu être la série du frelon vert), celui qui a aussi fait de lui une star, ce n'est bien sur pas son plus personnel ni son plus abouti, mais comme je l'ai déjà dit il préfigure son style, il l'affirme, et lui a surtout permit de l'améliorer et de le tester à l'écran jusqu'a un point très intéressant; il arrive bientôt à maturité ! Différence notable néanmoins, les combats sont irréalistes et sanglant, ce que Bruce Lee n'aimait pas beaucoup : ceux qu'il chorégraphiera plus tard seront attachés à représenter des choses réalisables sans trucages ni montages. La présence de Bruce Lee, la qualité des combats et leur intensité ont fait la réussite de ce film. Ce n'est pas en effet du coté du scénario que l'on peu trouver des éléments profondément novateurs : Il se déroule un peu comme celui d'un jeu vidéo: le gentil combat les méchants jusqu'a affronter le boss final dans un magnifique combat.
Rétrospectivement, on pourrait presque considérer ce film comme une pré quelle de La Fureur du Dragon (ce qui n'est bien sur pas la cas, mais enfin...) réalisé un an plus tard, suite au succès que l'on connaît, ou encore comme la gestation (voire la naissance) du Petit Dragon.
Carcharoth