Yatterman (Yattâman), Takashi Miike, 2009
Après Zebraman (2004) et quelques épisodes d'animes (mangas), voici une nouvelle adaptation d'une bande dessiné au cinéma par Takashi Miike. Présenté en ouverture de Fantasia, le film a de quoi surprendre. Quand on le voit, et lorsqu'on apprend qu'il sort du cerveau de Miike. Tourné entre God's Puzzle et Crows zéro II, Yatterman n'emprunte ni à l'un ni à l'autre et se démarque de la plus grande partie de la filmographie du réalisateur. Si celui ci est connu pour son coté touche à tout et la prolixité, il prouve avec ce film qu'il peut pousser le bouchon encore plus loin !
Personnellement je suis assez peu sensible aux animes et à l'esthétique des mangas, ainsi qu'à leur mode de fonctionnement ; tout comme j'adhère très peu aux J-dramas (même si ce blog est rattaché par overblog aux sites des groupies de starlettes japonaises...) ou à la mode kawaï. Yatterman s'intègre parfaitement à ces quelques univers. Comprenez donc qu'il a pu choquer, bouleverser et faire rugir les amateur du Miike d'Audition, Ichi et Master of Horror !
La série télévisée originale date de 1977 (une nouvelle version de 12 épisode a été tournée en 2008) et racontait les aventures de Gan Takada, alias Yatterman N°1 et Ai Chan alias Yatterman N°2. Ils étaient opposé à un trio de méchants dirigé par Doronjo, une terrible voleuse. Dans le film la mission tourne autour de la menace que fait planer le dieu des voleurs sur le monde. Il a en effet chargé l'équipe de Doronjo de récupérer pour lui quatre partie d'un crâne. Mais les Yatterman, alliés du bien et de la justice ne sont pas prêt à laisser faire cela, d'autant que la fille d'un archéologue disparu au cours de cette même quête vient leur demander du secours !
Les plus perspicaces d'entre vous auront déjà sentis le gros plagiat du dernier Indiana Jones (le crane de cristal), d'autant que l'archéologue manie aussi dans ce film le fouet ! Plus que de plagiat il faudrait ici parler de parodie ou d'hommage puisque imaginer Takashi Miike en manque d'imagination serait honteux ! L'esthétique (je ne sais pas si le mot n'est pas un peu exagéré pour parler de ce film...) de Yatterman est cartoonesque, kawaï à fond donc à mon goût très moche ! Mais elle est cohérente avec le scénario du film et les personnages, ainsi que leurs dénominations. Tout ici semble cibler le public ado ou enfantin, avec une petite romance bien huilée, des héros propres sur eux et un combat d'ouverture d'une non violence absolu. Tout est très mignon. En apparence en tous cas. Car si on dit adieu dès le début aux rails de coke de Dead or Alive, à la nécrophilie de Visitor Q, à la violence d'Ichi ou la terreur d'Audition, il y a tout de même quelques touches, quelques éléments qui rappellent que Miike reste lui même et qu'il n'a pas pu s'empêcher de dévier, même légèrement. Les rêves des bandits par exemple sont tout à fait bizarre, tout comme leur robot-vaisseaux qui est très sexué et vachement bien caréné. Ou encore les manifestations de bonheur chez Boyacky qui s'apparentent métaphoriquement à une grosse trique. C'est soft, c'est maquillé, mais c'est Miike quand même !
Concernant les acteurs, j'ai par contre bien du mal à dire s'ils surjouent exprès ou s'ils sont juste mauvais. La seconde hypothèse me paraît malheureusement la plus probable étant donné qu'il s'agit d'idole pop des jeunes japonais (Sho Sakurai est chanteur, présentateur télé et acteur de séries, Kyoko Fukada est elle aussi chanteuse, actrice et top model) dont les talents théâtraux ne sont pas reconnus mondialement... à l'inverse de leurs physiques aguicheurs ! Remarquez que ce jeu faux cadre très bien avec l'esprit du film, lui aussi assez niais et surfait de bout en bout. Notons toutefois que l'humour assez typique de ce genre cinématographique est difficilement traductible et qu'il fait parti des éléments culturels japonais qu'en occident on a bien du mal à comprendre et à apprécier...
L'esprit farfelu et déjanté de Miike lui, passe très bien les frontières et on n'a pas trop de peine à le percevoir à travers tout ce qui nous paraît idiot dans le film.
Yatterman ne restera donc pas comme un film très réussi de Takashi Miike, même les morceaux de comédie musicale sont passablement ratés (à l'inverse de ceux d'Happiness of the Katakuris qui étaient hilarants!) alors qu'ils devraient être le clou du métrage, vantant les talents des héros-chanteurs qui sont dans ce film pour booster une carrière à la télé et pas gagner un oscar... que de toutes façons ils ne peuvent espérer. Le final, ironique, enfantin et intelligent à la fois prouve bien que Miike garde du recul sur son travail et sait ce qu'il fait et veut...
Un film à recommander donc aux fans de ces deux acteurs (notamment pour la scène du bain de Fukada), de l'esprit kawai et J-drama ou encore aux nostalgiques de la série de 77. Pour les aficionados du Miike trash et violent, passez votre chemin c'est ici (presque) l'inverse !
Un preuve de plus que cet homme est fou et capable de tout, du meilleur comme du pire !
Carcharoth