Tigre et dragon, le meilleur Wuxia de la décennie ?

Publié le par Nostalgic-du-cool

Tigre et Dragon 2000 2

 

 

Le titre est flatteur, et volontairement faux, puisque la décennie n'est pas terminée. Le film date en effet de l'an 2000. Nombreux sont pourtant les critiques, spectateurs et cinéphiles qui s'accordent pour dire qu'Ang Lee a réalisé un très bon film, alliant subtilement action, drame, Histoire et profondeur.

 

Il raconte l'histoire de Li Mu Baï (Chow Yun Fat), Lu Shu Lien (Michelle Yeoh) et autres Jen (Zhang Ziyi)... Ce premier est un guerrier reconnu, las des combats il souhaite abandonner sa vie nomade et belliqueuse. Il confit donc son épée, Destinée, à celle qu'il aime pour qu’elle la remette à un grand marchand. Arrivée à destination, l’amie de Li Mu Bai fait la connaissance de Jen, fille du marchand, qui semble assez commune, et qui, promise à un prince qu’elle n’aime pas, se révolte contre l’autorité paternelle. Elle apprend aussi qu’une femme, ennemie de longue date, traîne dans les parages. On la surnomme la Hyène. Le soir même, l’épée est subtilisée. Li Mu Bai et Lu Shu entreprennent alors de la retrouver. En parallèle, on découvre l’histoire de Jen, enlevée par un bandit des steppes de l’arrière pays, et avec qui elle entretient des relations ambiguës.

 

 

 

 

tigre-dragon-103381b8f  L'’enquête menée par les deux guerriers (enfin un guerrier à la retraite et une guerrière…) les conduit vite à penser que Jen n’est pas étrangère à la mystérieuse disparition, ainsi que la Hyène, qui a une vieille rancune envers Li Mu Baï. Après de nombreux combats, des courses poursuites toutes plus rapides et époustouflantes les unes que les autres, arrive enfin le combat final entre la Hyène et les deux guerriers. La sorcière est tuée mais réussit à blesser son ennemi avec une fléchette empoisonnée…

 

Vous devinez la suite, il meurt malgré les soins de Lu Shu (à qui il ose enfin avouer son amour, impossible à cause des normes sociales) et l’aide de Jen qui reconnaît sa folie. Elle non plus ne tarde d’ailleurs pas à mourir, ou plus précisément à se suicider, du haut d’une falaise embrumé, prés d’un temple et de son ami bandit…

 

 

 

 

 

 

Voila un résumé rapide et non exhaustif (et d’ailleurs aussi assez embrouillé à la relecture) du film. Il faut noter plusieurs choses : Ang Lee à un parcours cinématographique très éclectique (la preuve il n’y a pas si longtemps avec Brokeback Mountain), et cela se sent dans le film : Son approche du Wuxia est très large, et il englobe dans le film de nombreux genres et de nombreux messages, ce qui en fait une œuvre aux multiples niveaux de lecture.

 

tigre-dragon-103382f55  Ainsi, au dela du film de sabre, on peut faire ressortir plusieurs aspects : La lutte pour l’émancipation de Jen, son combat en quelque sorte féministe, ce en quoi elle rejoint la Hyène dans sa détestations de l’ordre établi par les hommes, et dictés par une « coutume » qui leur est toujours favorable. Elle manie le sabre aussi bien qu’un homme et entend par la être considéré comme une égale. D’où son opposition à Li Mu Baï, gardien des arts martiaux traditionnels à ses yeux, donc opposé à leur pratique par les femmes, même s’il est en réalité très ouvert, mais lui-même soumis aux us de son pays. Cette mise en avant, tout le long du film, du rôle castrateur des traditions, par exemple dans la relation entre Li Mu et Lu Shu, qui s’aiment mais ne peuvent concrétiser cet amour ou même se l’avouer par peur du déshonneur.

     

De même, ce sont des modes de vie traditionnels qui ont poussés Jen vers le rejet de son milieux social : Son mariage d’intérêt avec un prince l’a poussé dans une voie qu’elle n’aurait sûrement pas exploré de façon aussi poussé sinon. Pour poursuivre sur la trame de son mariage, elle s’y oppose concrètement en ayant un amant (Lo) dont elle est l’opposée : femme, riche, urbaine, « précieuse », cultivée… (Une sorte de syndrome de Stockholm) et qui l’a auparavant kidnappée. Pour ajouter un élément à l’analyse sur les conventions sociales, citons l’objet central du film, qui les lient tous (et non, pas un anneau unique pour dans les ténèbres les lier !!), uné épée nommée Destinée… Destin, tradition, tout se superpose et offre une trame au film.

 

Autre élément intéressant, toujours à propos de Jen, sa quête d’identité. Ayant rejeté sa famille, elle doit se tourner vers des parents de substitutions : Peipei « Hyène » lui sert de mère, Li Mu Baï peut être considéré comme son maître et Lu Shu comme sa sœur (Cf. Film-et-culture.org).

 

Voila donc quelques éléments qui devrait vous convaincre de la profondeur du film : les personnages sont étudiés en profondeur et leur nature ambiguë est soulignée à de maintes reprises : le film refuse ainsi le manichéisme, même apparent, que bien des Wuxia ont appliqués à leur scénario et oppose à cela des être très humains, avec des doutes et des paradoxes, très loin des super héros malgré leur maîtrise surhumaine du sabre.

 

Les combats justement… Chorégraphiés par un maître du genre (Yuen Woo Ping), filmés à la perfection, ils nous emmènent dans les hauteurs d’une forêt de bambous, ou bien font virevolter les habits des combattants dans la nuit d’une cour de palais. Fidèle à la définition de son genre, ce Wuxia oscille entre tradition et légende : les combats sont aériens, les épées volent, tournoient tandis que les sauts de leurs possesseurs durent une éternité ou atteignent une hauteur prodigieuse. Le tout est d’une rare beauté et parait presque réalite si l’on fait abstraction de certains détails…

 

 

Tigre et dragon


 

 Les combats en eux même sont très bon aussi, bien que loin d’être réalistes ou tournés par des acteurs habitués à ce genre de prestations (comme ce fut au contraire le cas pour Baby cart par exemple, ou les films de Tsui Hark pour rester en Chine), et jamais on ne note de défaillances flagrantes.

 

Le film a aussi eu le mérite de savoir marier un financement américain à un film tourné en ancien chinois, avec des acteurs pas tous reconnus par hollywood et dans un genre dont l’âge d’or était passé depuis longtemps. Un film hommage en quelque sorte, mais qui a relancé la mode du Wuxia et des personnages centraux féminins dans les films d’actions.

 

 

 

 

Ainsi Ang Lee à réalisé un film syncrétique, se nourrisant de ses réflexions passées, de ses films de jeunesse, du budget et de son expérience américaine, pour donner naissance à une œuvre originale, novatrice, profitant des progrès de la technique, mais fidèle aux codes du genre.

 

Le scénario n’est pas sacrifié au profit des combats, qui eux même ne servent pas de prétextes à une mauvaise intrigue. Chaque chose est à sa place, mais est lié et interdépendant des autres éléments, ce qui fait que le film se tient, nous tient en haleine et donc plait.

 

 

 

Il a suscité la réaction de Yimou : Hero et bien d’autres films de moindre renommée

 

 

Carcharoth

Publié dans Chine et HK

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C
Ah la la, quel film !! Un pur monument.
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