Mad Detective, il ne voit pas des gens qui sont morts mais il voit des esprits...
Voilà je crois que je vais établir mon record perso aujourd'hui en évoquant avec plus de 3 mois de retard une sortie ciné de cette année. Il s'agit de Mad Detective l'un des derniers films du prolifique mais génial Johnnie To, d'ailleurs j'ai laissé passer tellement de temps qu'entre temps il a deja sorti un nouveau film "diffusé" (je mets des guillemets parce que le passer dans même pas 10 salles je n'appelle pas ça diffuser) en ce moment et intitulé Sparrow. Ce dernier est à ma grande honte déjà évoqué sur le blog ici, tandis que moi je traine encore. Donc revenons à ce film assez particulier qui confirme que si Johnnie To est le maitre incontesté du polar made in Hong Kong c'est parce qu'il sait sans cesse se renouveller. Ici autour d'une intrigue de polar assez classique, qui rappelle d'ailleurs celle de PTU, le réalisateur intègre des élements fantastiques avec un policier profiler médium capable de voir des esprits. Bref un polar fou, dans tous les sens du terme où To nous montre sa virtuosité dans la mise en scène en particulier pour la dernière scène et où on retrouve un Lau Ching-Wan plus déjanté que jamais.

Ce film prouve une chose c'est que l'on ne peut jamais prévoir à quoi va ressembler un film de To et qu'il ne faut pas faire l'erreur de le cantonner comme un réalisateur de polar classieux aux gunfights renversants, il est beaucoup plus que cela. Dans Mad Detective co-réalisé avec Wai Ka-Fai, le compère de longue date, ils ont co-réalisé plusieurs films ensemble (comme Fulltime Killer) et ce dernier a signé plusieurs scénarii de films de To. Enfin c'est ensemble qu'ils ont crée en 1996 la société de production Milkyway Image leur permettant de s'émanciper et de produire le cinéma qu'ils désirent explorant tous les genres de la comédie, à la comédie romantique en passant par le polar (par contre Allociné indique qu'il va sortir un film intitulé Courthouse on a horseback cependant c'est le titre anglais du film de Liu Jie Le dernier Voyage du Juge Feng et j'avoue que je suis très sceptique sur un eventuel remake de ce film très indé sur la justice chinoise...). Ce film marque aussi les retrouvailles entre le réalisateur et l'acteur Lau Ching-Wan acteur auparavant assez récurent chez To mais qui n'avait plus tourné avec lui depuis 2002. Le choix est payant car la prestation de l'acteur crève l'écran, c'est lui qui donne toute sa qualité au film. Aussi cela offre un petit changement car on commençait à s'habituer à l'excellent Simon Yam acteur fétiche de To en ce moment.

Alors disons quelques mots de cette intrigue qui repose sur un postulat assez basique comme nous l'avons dit. L'arme d'un policier est liée à toute une série de cambriolages et même à des meurtres. Cette arme avait disparu lorsque 2 policiers poursuivaient un délinquant dans un sous bois. Ils perdent sa trace et seul un des policiers pourra ressortir de ce sous bois, son collègue a mystérieusement disparu et seule son arme va réapparaitre. L'inspecteur Ho un jeune et ambitieux officier de police est chargé de l'enquête mais assez vite il patauge dans cette affaire. Il décide alors de faire appel à son idole, une légende, l'inspecteur Bun qui a été écarté de la police pour ses méthodes peu orthodoxes et qui vit desormais comme un reclus. Il faut reconnaitre que malgré des résultats excellents et de réels talents de profiler, Bun restait un inspecteur bien étrange. En effet plus qu'un profiler c'est une sorte de médium capable de lire l'esprit des gens, plus exactement de voir leurs esprits, leur âmes qui se matérialisent sous la forme d'une personne invisible sauf pour Bun, sorte d'ange gardien qui murmure aux gens ce qu'ils doivent faire. C'est encore flou mais je developperai plus bientôt. Donc grâce à ce don il est capable de résoudre les situations les plus complexes mais il doit se mettre en condition pour revivre la scène : ainsi durant le film il va être balancé des escaliers enfermé dans une valise, ou enterré vivant, allant même jusqu'a uriner sur le suspect dans les toilettes publics (scène absolument hilarante) tout cela pour que ces derniers se dévoilent, pour entrer dans la tête des coupables. Si les résultats sont là, la méthode gène plus et lorsqu'il décide pour le départ du chef de la police de lui offrir en guise de cadeau son oreille en la découpant devant lui c'en est trop et il est remercié par la police.
Donc le jeune flic va faire appel à ce nouveau retraité qui semble plus fou que jamais, en effet il parle en permanence avec sa femme seulement le problème est que seul lui peut la voir (cela donnera une scène très drôle dans un restaurant avec l'inspecteur Ho, sa copine, Bun et sa femme imaginaire). Toutefois il reste toujours aussi efficace et rapidement les soupçons se portent sur le policier dont le coéquipier a disparu, en effet ce dernier est etrange mais il est difficile à cerner même pour Bun qui peut voir les esprits car ce dernier n'a non pas un fantôme, qui est la réprésentation dans le monde des esprits de la personnalité profonde de la personne, mais 7 esprits différents. Chacun incarne une facette de sa personnalité ce qui donne des scènes hallucinantes et incroyablement bien foutues. Ainsi quand Bun l'interroge avec Ho dans un restaurant, si Ho ne voit que "l'enveloppe materielle" de ce supect Bun voit ses différents démons, qui représentent les aspects de sa personnalité, ainsi un gros pataud tout transpirant montre l'angoisse qu'il ressent face aux questions et quand le gros (incarné par le génialissime Suet Lam) va craquer c'est une femme qui le fait taire et prend la parole, elle incarne le côté froid et calculateur de cet homme, c'est l'esprit dominant c'est son trait de caractère le plus marqué. Bref c'est assez difficile à expliquer mais c'est impressionant à voir, l'inventivité de la mise en scène est géniale et les possibilités de mise en scène offertes par ce pouvoir paranormal sont infinies car selon les plans on peut voir les personnages ou la réprésentation de leurs esprits. Par exemple le flic Ho a pour esprit un jeune enfant cela répresente une certaine innocence mais aussi une certaine peur, il est terrifié à l'idée de faire une erreur et les méthodes particulières et trop entreprenantes de Bun l'inquiètent.

Ici on voit les différents esprits du policier suspecté qui essaie de l'empêcher de se servir de son arme. Jamais un conflit interne n'aura été presenté avec tant de clarté...
Bon j'abandonne le résumé du film il est difficile à décrire et plus riche qu'on ne croit, ce qui est classique chez To. Bref c'est un polar atypique qui se moque un peu de cette tendance du polar américain avec le profiler super balèze qui devine les traumatismes de votre enfance juste au choix de votre parfum (cf Hannibal Lecter dans Le Silence des Agneaux). Le réalisateur va au bout de cette logique allant jusqu'a créer ce profiler médium avec une éxagération assumée, offrant un personnage absolument dejanté que Lau Ching-Wan campe à merveille. Il est fou mais drôle, dingue mais émouvant et pour un fou il est parfois d'un incroyable lucidité, sous son air de taré gentil il est loin d'être dupe. Finalement c'est le personnage le plus attachant car à la différence des autres il n'est pas interessé, dissimulateur. Donc l'intrigue est plutôt bonne car basé sur une idée géniale bien que très casse gueule mais le réalisateur exploite à merveille ce filon fantastique dans la lignée d'un Sixième Sens. C'est d'ailleurs très interessant de voir de façon explicite ce que pensent les personnages, leur psychologie. En plus il réussit à insuffler une touche humoristique très appréciable grâce au talent comique de l'acteur principal et comme d'hab les scènes d'action sont incroyables en particulier un final excellentissime rappelant celui de Reservoir Dogs où les différents personnages se tiennent en joue et là l'effet est démultiplié par un jeu de miroir où se refletent les personnages et leurs esprits et comme dans le film de Tarantino tout n'est qu'histoire de trahison et de confiance.

Image tiré de l'hallucinant final du film.
Voilà si on peut dire que ce film n'est pas le meilleur de To je pense qu'il est quasi impossible de critiquer la mise en scène. Pour ma part je la trouve absolument époustouflante c'est là toute la qualité du film, il sait jouer à merveille avec l'image, offrant des plans tout en contraste où se mélangent esprits et humains, mensonges et vérités, où la frontière entre le réel et le fantastique est poreuse et où pourtant tout est explicite. Avec les pouvoirs de Bun les pensées contenues deviennent apparentes, on voit ce que se disent les personnages, on sait qui parle, et ces evidences ne font paradoxalement qu'augmenter notre trouble. Ce film vient détruire bon nombre de conventions narratives que To lui même avait participées à mettre en place, les attentes du spectateur, les canons du genre tout est chamboulé, dans un splendide et ennivrant sabordage.

Mad Detective c'est la joyeuse destruction du polar made in Hong Kong par le maitre du polar lui même, pietinant les conventions, les attentes du spectateur et ce pour notre plus grand bonheur. Johnnie To mène à merveille sa barque et ce, même quand il la coule, il donne un film débordant d'inventivité, de folies assumées car finalement le Mad Director c'est To !
(Autre avis ici chez Ballbreaker)
Nostalgic Du Cool

Ce film prouve une chose c'est que l'on ne peut jamais prévoir à quoi va ressembler un film de To et qu'il ne faut pas faire l'erreur de le cantonner comme un réalisateur de polar classieux aux gunfights renversants, il est beaucoup plus que cela. Dans Mad Detective co-réalisé avec Wai Ka-Fai, le compère de longue date, ils ont co-réalisé plusieurs films ensemble (comme Fulltime Killer) et ce dernier a signé plusieurs scénarii de films de To. Enfin c'est ensemble qu'ils ont crée en 1996 la société de production Milkyway Image leur permettant de s'émanciper et de produire le cinéma qu'ils désirent explorant tous les genres de la comédie, à la comédie romantique en passant par le polar (par contre Allociné indique qu'il va sortir un film intitulé Courthouse on a horseback cependant c'est le titre anglais du film de Liu Jie Le dernier Voyage du Juge Feng et j'avoue que je suis très sceptique sur un eventuel remake de ce film très indé sur la justice chinoise...). Ce film marque aussi les retrouvailles entre le réalisateur et l'acteur Lau Ching-Wan acteur auparavant assez récurent chez To mais qui n'avait plus tourné avec lui depuis 2002. Le choix est payant car la prestation de l'acteur crève l'écran, c'est lui qui donne toute sa qualité au film. Aussi cela offre un petit changement car on commençait à s'habituer à l'excellent Simon Yam acteur fétiche de To en ce moment.

Alors disons quelques mots de cette intrigue qui repose sur un postulat assez basique comme nous l'avons dit. L'arme d'un policier est liée à toute une série de cambriolages et même à des meurtres. Cette arme avait disparu lorsque 2 policiers poursuivaient un délinquant dans un sous bois. Ils perdent sa trace et seul un des policiers pourra ressortir de ce sous bois, son collègue a mystérieusement disparu et seule son arme va réapparaitre. L'inspecteur Ho un jeune et ambitieux officier de police est chargé de l'enquête mais assez vite il patauge dans cette affaire. Il décide alors de faire appel à son idole, une légende, l'inspecteur Bun qui a été écarté de la police pour ses méthodes peu orthodoxes et qui vit desormais comme un reclus. Il faut reconnaitre que malgré des résultats excellents et de réels talents de profiler, Bun restait un inspecteur bien étrange. En effet plus qu'un profiler c'est une sorte de médium capable de lire l'esprit des gens, plus exactement de voir leurs esprits, leur âmes qui se matérialisent sous la forme d'une personne invisible sauf pour Bun, sorte d'ange gardien qui murmure aux gens ce qu'ils doivent faire. C'est encore flou mais je developperai plus bientôt. Donc grâce à ce don il est capable de résoudre les situations les plus complexes mais il doit se mettre en condition pour revivre la scène : ainsi durant le film il va être balancé des escaliers enfermé dans une valise, ou enterré vivant, allant même jusqu'a uriner sur le suspect dans les toilettes publics (scène absolument hilarante) tout cela pour que ces derniers se dévoilent, pour entrer dans la tête des coupables. Si les résultats sont là, la méthode gène plus et lorsqu'il décide pour le départ du chef de la police de lui offrir en guise de cadeau son oreille en la découpant devant lui c'en est trop et il est remercié par la police.
Donc le jeune flic va faire appel à ce nouveau retraité qui semble plus fou que jamais, en effet il parle en permanence avec sa femme seulement le problème est que seul lui peut la voir (cela donnera une scène très drôle dans un restaurant avec l'inspecteur Ho, sa copine, Bun et sa femme imaginaire). Toutefois il reste toujours aussi efficace et rapidement les soupçons se portent sur le policier dont le coéquipier a disparu, en effet ce dernier est etrange mais il est difficile à cerner même pour Bun qui peut voir les esprits car ce dernier n'a non pas un fantôme, qui est la réprésentation dans le monde des esprits de la personnalité profonde de la personne, mais 7 esprits différents. Chacun incarne une facette de sa personnalité ce qui donne des scènes hallucinantes et incroyablement bien foutues. Ainsi quand Bun l'interroge avec Ho dans un restaurant, si Ho ne voit que "l'enveloppe materielle" de ce supect Bun voit ses différents démons, qui représentent les aspects de sa personnalité, ainsi un gros pataud tout transpirant montre l'angoisse qu'il ressent face aux questions et quand le gros (incarné par le génialissime Suet Lam) va craquer c'est une femme qui le fait taire et prend la parole, elle incarne le côté froid et calculateur de cet homme, c'est l'esprit dominant c'est son trait de caractère le plus marqué. Bref c'est assez difficile à expliquer mais c'est impressionant à voir, l'inventivité de la mise en scène est géniale et les possibilités de mise en scène offertes par ce pouvoir paranormal sont infinies car selon les plans on peut voir les personnages ou la réprésentation de leurs esprits. Par exemple le flic Ho a pour esprit un jeune enfant cela répresente une certaine innocence mais aussi une certaine peur, il est terrifié à l'idée de faire une erreur et les méthodes particulières et trop entreprenantes de Bun l'inquiètent.

Ici on voit les différents esprits du policier suspecté qui essaie de l'empêcher de se servir de son arme. Jamais un conflit interne n'aura été presenté avec tant de clarté...
Bon j'abandonne le résumé du film il est difficile à décrire et plus riche qu'on ne croit, ce qui est classique chez To. Bref c'est un polar atypique qui se moque un peu de cette tendance du polar américain avec le profiler super balèze qui devine les traumatismes de votre enfance juste au choix de votre parfum (cf Hannibal Lecter dans Le Silence des Agneaux). Le réalisateur va au bout de cette logique allant jusqu'a créer ce profiler médium avec une éxagération assumée, offrant un personnage absolument dejanté que Lau Ching-Wan campe à merveille. Il est fou mais drôle, dingue mais émouvant et pour un fou il est parfois d'un incroyable lucidité, sous son air de taré gentil il est loin d'être dupe. Finalement c'est le personnage le plus attachant car à la différence des autres il n'est pas interessé, dissimulateur. Donc l'intrigue est plutôt bonne car basé sur une idée géniale bien que très casse gueule mais le réalisateur exploite à merveille ce filon fantastique dans la lignée d'un Sixième Sens. C'est d'ailleurs très interessant de voir de façon explicite ce que pensent les personnages, leur psychologie. En plus il réussit à insuffler une touche humoristique très appréciable grâce au talent comique de l'acteur principal et comme d'hab les scènes d'action sont incroyables en particulier un final excellentissime rappelant celui de Reservoir Dogs où les différents personnages se tiennent en joue et là l'effet est démultiplié par un jeu de miroir où se refletent les personnages et leurs esprits et comme dans le film de Tarantino tout n'est qu'histoire de trahison et de confiance.

Image tiré de l'hallucinant final du film.
Voilà si on peut dire que ce film n'est pas le meilleur de To je pense qu'il est quasi impossible de critiquer la mise en scène. Pour ma part je la trouve absolument époustouflante c'est là toute la qualité du film, il sait jouer à merveille avec l'image, offrant des plans tout en contraste où se mélangent esprits et humains, mensonges et vérités, où la frontière entre le réel et le fantastique est poreuse et où pourtant tout est explicite. Avec les pouvoirs de Bun les pensées contenues deviennent apparentes, on voit ce que se disent les personnages, on sait qui parle, et ces evidences ne font paradoxalement qu'augmenter notre trouble. Ce film vient détruire bon nombre de conventions narratives que To lui même avait participées à mettre en place, les attentes du spectateur, les canons du genre tout est chamboulé, dans un splendide et ennivrant sabordage.

Mad Detective c'est la joyeuse destruction du polar made in Hong Kong par le maitre du polar lui même, pietinant les conventions, les attentes du spectateur et ce pour notre plus grand bonheur. Johnnie To mène à merveille sa barque et ce, même quand il la coule, il donne un film débordant d'inventivité, de folies assumées car finalement le Mad Director c'est To !
(Autre avis ici chez Ballbreaker)
Nostalgic Du Cool