My blueberry nights, un film pas tarte (aux myrtilles) du tout !
My blueberry nights, Wong Kar-wai, 2007, HK.
Se trouver grâce au miroir de lautre.
Enfin sur Asiaphilie larticle concernant le dernier Wong Kar-wai ! Foule nombreuse approche ! Spectateur ravi, internaute de passage, romantique transit, laisse tes yeux parcourir ces quelques lignes, et nous saurons les récompenser par des images de certaines des plus belles femmes du cinéma holywoodien (voire de lunivers, nen déplaise aux ravissantes vénusiennes quAphrodite a doté de sa beauté) filmées par le cinéaste le plus « esthétique » dAsie. Esthétique, voila un mot qui reviendra souvent dans cette critique, avec tout le champ lexical correspondant. Dailleurs cet article sera presque exclusivement laudatif, comme souvent sur asiaphilie. Non pas que le film soit parfait, mais la philosophie maison veut que lon se réjouisse des qualités dune uvre, et que lon soppose à toutes les critiques de frustrés que lon peut lire ou entendre.
Etape étasunienne dun réalisateur habitué à voyager (ne serait-ce qua Cannes, mais aussi en Argentine, et ailleurs ), My blueberry nights est un film qui a le goût sucré de la tarte en question (VF : aux myrtilles !). Road trip, film initiatique, nocturne, urbain, coloré, romantique, amoureux. Cest un morceau de printemps en hiver.
Pour une fois, je vais essayer de faire un résumé réellement court et succinct, sans trop de révélations même si laffiche donne le fin mot du film, et quencore une fois il ny a pas dintrigue suspensive, donc tout dire ne gâcherait rien. Mais enfin
Jeremy (Jude Law) tient un bar à N.Y. Anglais qui rêvait de faire tous les marathon du pays il a finalement posé ses bagages sur la grand pomme pour y servir des tartes aux myrtilles à cause dun amour russe. Dans son bar il recueille de nombreux amoureux éconduits, de couples en difficultés qui lui laissent leurs clés. Clés de leur cur, de leur amour, de la porte de leur nid. Lui, sentimental et obéissant à une recommandation de sa russe, les conservent dans un bocal. Un jour, cest Elizabeth qui passe sa porte, cherchant son copain. Elle apprend par Jeremy quil y a mangé avec une femme. La rupture est consommée. Après avoir passé plusieurs nuits de déprime accoudée au comptoir, discutant avec le barman et mangeant les seuls desserts qui lui reste à cette heure : des tartes aux myrtilles, elle décide de partir.
Son voyage à travers elle-même lui fera parcourir les USA dEst en Ouest, pour finalement revenir sur ses pas, mais par un autre chemin
En encore plus bref, ce sont les sinuassions dune femme qui se cherche et va à la rencontre des autres pour apercevoir en eux son reflet.
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On pourrait à première vu se demander à propos du neuvième film de WKW, « mais quallait-il faire dans cette galère ?». Aller tourner un film aux Etats-Unis, en anglais qui plus est, avec des acteurs exclusivement holywoodiens, cela pouvait ressembler à la fuite dun Woo ou dun J. Chan en occident et lon pouvait alors craindre la même chute de qualité et dinventivité. Mais non. WKW qui voyage cest un réalisateur qui apporte tout son savoir faire et qui le conserve, y adjuvant celle de la ou il arrive Et quoi quon en dise de lautre coté de latlantique (du pacifique pour WKW, ne soyons pas européo centré) il y a du lourd et du bon. Il suffit pour sen convaincre de regarder le casting : Norah Jones, Jude Law, Natalie Portman, Rachel Weisz, David Strathairn Que de bons acteurs, de belles actrices (on me dit dans loreillette que le féminin de bon est « bonne », et non pas belle, étrange cette erreur ), un concentré de talent modelé par le réalisateur. Autre aspect qui pouvait susciter des craintes : le script, écrit en anglais par WKW himself. Alors premièrement il a été secondé par Lawrence Block ce qui réduisait les risques, et ensuite il semble parfaitement maîtriser la langue de Allen et du mayflower (ou plutot celle parlé sur « la montagne dor » pour se placer du point de vue chinois*). Les dialogues sont bien écrit donc, et puis pour nous pauvres français minables en langue, ça ne fait pas grande différence hein ? du moment que le fond y est ! Je déconne mais bon, le fond y est aussi. Toujours ces même thèmes dailleurs : Amour, solitude, quête du « moi », mélancolie Qui sont développés avec le même talent et les même « tics » de réalisation : plan travaillés à lextrème, couleurs recherchés, souvent chaudes, celle des néons, des lumières tamisées de bar, dun coucher de soleil. Musique aussi toujours très importante, brodant encore parfois les mélodies qui lui sont chères avec des instrument différents, plus typique du pays. Evidemment il incruste des titres de Norah Jones et des morceaux jazzy qui marchent très bien avec le film. Cat Power, une des chanteuses dont les morceaux sont utilisés apparaît dailleurs dans le film, elle joue en effet le rôle de Katya, lex de Jeremy. Il faut aussi noter que si le fond sonore reste de qualité cest sans nul doute grâce au monsieur BO attitré de WKW, Shigeru Umebayashi.
Bon revenons un instant sur les thèmes abordés, sur le sujet du film et la façon de les aborder. Lamour encore une fois semble difficile, éphémère, merveilleux mais aussi toujours source de douleurs à terme. Ces douleurs, si elle ne détruisent pas, peuvent permettre de rendre plus fort, meilleur, en tous cas font changer lindividu ; à limage dElizabeth, qui change de prénom comme de ville (Lizzie, Beth, ) pour finalement aller retrouver Jeremy, qui attend lamour dans son bar (tout ça parce que sa mère, lorsquil était enfant, lui avait dit dattendre sur place au cas ou i les perdrait) après lavoir perdu. Deux techniques pour un même résultat, lamour retrouvé, la vie qui de nouveau a un goût, lavenir qui a une forme.
Dans ses pérégrinations, Elizabeth a rencontré de nombreuses personnalités marquantes : après le couple de 2046, WKW ouvre ses films sur de plus nombreuses personne : Un flic alcoolique mais amoureux, une femme qui semble facile mais cache une fragilité certaine, une menteuse professionnelle en bisbille avec son père, etc Chacun est un miroir qui permet à la jeune héroïne de se retrouver, de sentrevoir en eux, de se raccrocher à des morceaux de leur personnalité, de les faire siens. Ou mieux encore de se re-créer en tant quindividu avec ces différents modèles ou anti-modèles. Car tel est bien le but de son voyage. Outre le fait de pouvoir « traverser la rue » (et retourner voir Jeremy avec autre chose en tête que son ex-copain), elle doit se reconstruire. Acheter une voiture, le but officiel quelle ne cesse de répéter, nest quune façade, inconsciente ou pas. Bon voila en gros les quelques truismes quil y avait à dire sur ce film, je laisse un peu dans le flou pour que Nostalgic puisse parler à son aise, sans avoir peur de faire des redites
Que ceux qui ont trouvés In the mood for love long se rassurent, celui-ci est beaucoup plus court, seulement 1h40, on dirait bien que WKW sest mis aux standards du pays, même si comme je lai dit on retrouve ses thème set surtout ses couleurs, cette ambiance chaleureuse et douce, que les fans apprécieront, et que ceux qui déteste continueront de détester, ce film étant en effet très loin dêtre une rupture dans luvre de WKW.
Carcharoth, en direct du printemps de WKW, à vous les studios (de nostalgie bien sur)!

PS: j'allais oublier de vous recommander d'aller voir le film ! Ba, rien qu'en lisant le casting vous avez du être tenter non ? ceux qui disent non peuvent sortir.
_Une émission sur la filmographie de Wong Kar-wai ici
_Un entretien du réalisateur chez les Inrock par la.
*Gum shan, ou montagne dor était le nom que donnaient les chinois et les agents de recrutement américains à la Californie pour attirer les autochtones vers les mines de ce pays au XIXe s., lesclavage ayant été abolis quelques années auparavant.
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Je dois bien l'avouer le nouveau Wong Kar-Wai m'a surpris, décontenancé. J'avais adoré ses deux précedents films à savoir 2046 et In The Mood For Love, mais là il faut bien reconnaitre que nous avons eu droit à nouveau pays à une nouvelle réalisation. Tout d'abord My Blueberry Nights est plus court, je n'ai pas retrouvé la lenteur, la langueur toute asiatique qui caractérisait les films, avec ces longs plans contemplatifs et esthétisants, je n'ai pas retrouvé la lumière tamisée et l'atmosphère surannée des films précédents qui sublimaient si bien les actrices asiatiques dans leurs élégantes robes chinoises. Cela est du certainement au fait que le réalisateur se soit brouillé avec le génial mais néanmoins particulièrement chiant Chrystopher Doyle, immense directeur photo, célèbre pour ces ambiances feutrées et classieuses. Puis je n'ai pas retrouvé les intrigues complexes et sinueuses des précedents films qui exigeaient au moins deux visionnages pour pouvoir s'avouer enfin qu'on avait pas tout compris, cette fois l'intrigue est limpide, beaucoup plus simple, plus rectiligne presque. Enfin je n'ai pas retrouvé les envoûtants morceaux de musique classique et les vieux standards des années 50, au lieu de ça on a droit à une ambiance plus moderne, plus jazzy avec des morceaux de Norah Jones, Cat Power. Là je sens que certains se frottent les mains et se disent enfin Asiaphilie arrête sa politique démago et va enfoncer un film, mais que nenni, j'ai certes trouvé My Blueberry Nights différent mais cela n'empêche que j'ai beaucoup apprécié.
J'ai vraiment été impressionné par la capacité d'adaptation du réalisateur qui débarque dans un nouveau pays pour tourner dans une langue qu'il ne maitrise pas totalement avec des acteurs anglo-saxons or il a su adopter un nouveau style plus accessible, plus occidental ai-je envie de dire, sans faire de concessions, sans renier sa sensibilité. C'était une opération périlleuse la plupart des réalisateurs qui se sont exportés aux Etats Unis, à trop vouloir s'adapter à leur nouveau public ont fait des films plats, creux, sans âme. Ce n'est pas le cas de Wong Kar-Wai, qui a su s'adapter sans se trahir. Comme nous le disions déjà le film est plus court, l'intrigue est plus claire, puis le style du film à savoir un road movie est typique du cinéma américain. En réalité sur la forme c'est une comédie dramatique américaine typique dans tous ses élements avec ses anti héros à la dérive, ses rencontres fortuites au fil des voyages de personnages atypiques, ses longs trajets à bord de vieilles voitures américaines sur les routes rectilignes et quasi desertes du pays. Même la topographie est respectée, on retrouve les lieux classiques du ciné américain à savoir le fast food et ses fameuses tartes, le petit bar sombre et ses piliers de comptoir aux destins tragiques. Bref tout ça a déjà été vu et revu mais ça n'avait pas encore été vu par les yeux de Wong Kar-Wai qui tout en suivant les codes du genre réussit à nous emporter et à nous perdre dans l'immensité du territoire américain, sûrement car à la différence de beaucoup il a compris que c'est quand il est universel que le cinéma touche et non quand il est calqué sur une culture.
Une chose est sûre c'est que quel que soit le lieu, le style, quelle que soit la nationalité des acteurs, quelle que soit la complexité de l'intrigue le réalisateur sait sublimer le réel, le quotidien, les corps, transformant une scène banale du quotidien en intense moment de poésie : jamais tarte aux myrtilles n'aura renvoyé à tant de symboles. Comme nous le disions au début, la réalisation change mais la maitrise, la virtuosité sont toujours là, les plans sont moins longs, moins langoureux, plus chargés et colorés mais ils sont toujours aussi beaux. L'intrigue est plus basique, plus convenue mais la subtilité, la finesse dans la manière d'aborder les thèmes est toujours là, puis au final on s'en fout que l'histoire soit prévisible, l'important c'est qu'on y croit, qu'on se laisse bercer, qu'on glisse le long de la pellicule du film au rythme des personnages et de leurs émois. Les actrices ne sont plus asiatiques mais sont toujours aussi délicieuses, Wong Kar-Wai n'a pas oublié comment on filmait les femmes. Le choix surprenant de la craquante Norah Jones s'avère payant, son inéxpérience face à la caméra lui donne un côté innocent et légérement maladroit extrêmement attendrissant et émouvant. A la fois pétillante et reservée elle est une révélation (pour une fois qu'un chanteur passant au cinéma ne surjoue pas c'est plaisant). Rachel Weisz est hypnotisante dans son rôle de femme fatale dissimulant un être blessé, enfin Natalie Portman nous charme encore une fois avec un personnage de joueuse inveterée, menteuse comme un arracheur de dents. Ah j'oubliais il y a des hommes aussi dans le film, (ça doit être à cause de mon côté "contemplatif") toutefois il faut reconnaitre que Jude Law et surtout David Strathairn sont plus que convaincants. Enfin il faut évoquer la musique toujours essentielle chez Wong Kar-Wai cette fois il renouvelle un peu son répertoire en gardant toujours cette atmosphère enivrante et nostalgique grâce à une B.O faite de jazz et de folk (culture américaine oblige !) emmenée par le titre entêtant de Cat Power : The Greatest.

Pour conclure je dirais que voir My Blueberry Nights c'est comme écouter un CD de Cat Power, ça détend, ça relaxe, pendant toute la durée on se laisse bercer par le rythme enveloppant et à la fin on reste à somnoler, plongé encore dans la poésie du moment passé. C'est à la fois simple et travaillé mais cela contient des échos plus profonds que ce que l'on ne pensait. C'est le genre de choses qui nous rappelle que parfois ça a du bon la culture américaine surtout quand elle fait preuve d'ouverture d'esprit soit car décrite à travers les yeux d'un asiatique, soit car chantée par une artiste indépendante. (Evidement après cette ode à Cat Power je vous ais mis la musique du film que je viens de recevoir merci père noël). Par contre si jamais vous n'êtes pas d'accord avec nous, si vous en avez marre de lire nos longs éloges flatteurs et démago, c'est chez les Gras que vous devez allez voir le film se faire descendre en flèche ici.
Nostalgic Du Cool