Zebraman, Takashi Miike, 2004
Zebraman, Takashi Miike, 2004
Critiquer un film de Miike (« le fou filmant ») est toujours un exercice périlleux, une figure de style presque imposée dans le monde de la critique cinéma nippone et reconnue pour sa difficulté ! De tel préliminaires ne sont pas là pour excuser en avance un texte raté et inintéressant mais pour faire saisir à un éventuel néophyte que l'univers de Takashi Miike est spécial, que saisir le sens d'un de ses films n'est pas toujours évident et qu'osé livrer un avis dessus est toujours le fruit d'un coup de sang du type « aller ya pas de raisons, je me lance, s'en est finit de ma carrière aux inrocks mais j’aurai tout donné ! ».
Zebraman est le fruit de la collaboration de Miike donc, et de Sho Aikawa pour son centième rôle titre (dont certains / beaucoup chez Miike d'ailleurs : Dead or Alive, Gozu, …) qui voulait atteindre ce seuil symbolique avec ce réalisateur qu'il semble apprécier et dans un rôle qu'il désirait depuis longtemps : un super héros ! Pour ce faire le réalisateur est allé jusqu'à créer une fausse ancienne série qui inspirerait le personnage de Sho Aikawa (Shinichi Ichikawa), enseignant raté, mal aimé par ses élèves dont il ne sait pas se faire respecter et malheureux dans son foyer. Ce dernier revêt le costume qu'il s'est fabriqué pour se redonner du courage. Un soir, alors qu'il cherche à montrer son costume à un nouvel élève fan de la série, il entend un cri strident. Il accourt et doit affronter un homme crabe en train d'attaquer une jeune fille. Il découvre alors qu'il ne fait pas que se travestir en Zebraman mais en possède aussi les pouvoirs. A ce moment précis bien sur, on découvre que le quartier est truffé d'extra-terrestres aux intentions belliqueuses. Voilà une mission toute trouvée pour le super-héros et son jeune supporter.
Miike revisite donc encore une fois un genre, après le western, le film d'horreur, de Yakuza, la comédie musicale il s'attaque aux super-héros. Il réalise d'ailleurs un sacré melting pot ! Je ne suis pas spécialiste ni amateur du genre et je ne pourrais donc pas fournir une liste exhaustive, mais les emprunts sont légions de Ring aux Power Rangers où à Batman. On sent aussi qu'il prend une petite distance et introduit des éléments comiques et burlesques, des références explicites. De plus, le twist final (que nous verrons plus tard) introduit une dimension de plus dans ce film et lui donne un autre sens, qui rejoint les thématiques du réalisateur.
Le début en effet n'est pas sans rappeler son Visitor Q, et certains détracteurs ont en effet qualifié Zebraman de Visitor Q héroïsé tant le situation de départ est similaire à celle de cette famille décomposé que décrivait Miike dans son docu-fiction trash. Cependant je trouve que l'on ne peut réduire ce film à cet aspect, puisqu'il se lance sur bien d'autres pistes. Outre évidemment celle du super-héros, on peut y voir une critique environnementale et politique du Japon actuel et voir surgir un des thèmes favoris de Miike, la nostalgie, partie intégrante de sa vision du bonheur (avec l'acceptation de soi et l'intégration dans une cellule familiale équilibré).
En effet (SPOILER)**********Shinichi et le jeune garçon handicapé ne sont qu'une seule et même personne (du moins dans la façon dont j'ai compris la scène finale), se regardant avec trente ans de décalage. L'adulte, s'acceptant tel qu'il est, devient ce super héros dont son fils peut être fier, un homme en fait.*******
Le film est pour moi coupé en deux ; et si l'on suit le sourire aux lèvres et avec plaisir les aventures du tout nouveau Zebraman, son combat final contre des flubbers géants (qui semblent sortis de Mars Attack) pêche par ses effets spéciaux très moyens et un manque de souffle quasi général. Si la magie miikienne opère très bien pour les deux premiers tiers du film, il n'en est pas de même pour la fin qui laisse sur un petit goût d'inachevé, même si elle reste divertissante.
On retiendra donc un film sympa, divertissant, sorte de Kick Ass japonais mâtiné de Mars Attack, avec un Sho Aikawa en pleine forme pour son centième rôle principal. Quant à Miike ce n'est surement pas son meilleur film, reste à voir ce que donnera le second opus des aventures du Zébre volant !
Carcharoth