Le Voyage du Ballon Rouge, entre réalisme et poésie, la Vie vue par un ballon et Hou Hsiao Hsien
Voila pour m'excuser d'avoir évoqué un film trop connu à savoir Le Roi et Le Clown (tout de même deux semaines à l'affiche, puis gros succès en Corée) j'ai décidé de faire pénitence et de revenir avec un film bien plus modeste à savoir Le Voyage du Ballon Rouge, tourné en 30 jours, avec un budget certainement insignifiant. Bref il est passé si inaperçu que j'ignore sa date de sortie au cinéma il est passé récemment dans les salles de ma ville mais apparement il serait déjà sorti en 2006 (je suppose en secret, car je n'en avais jamais entendu parler auparavant), ah, si, il a été presenté dans la Catégorie un Certain Regard à Cannes (catégorie qu'il faudrait peut être renommer Un Seul Regard tant on a l'impression qu'en dehors des festivaliers personne ne verra le film). Bon alors j'imagine que vous devez vous dire qu'Asiaphilie devient fou, que tout fout le camp comme au Tibet après avoir évoqué un film de Scorsese, voila qu'ils évoquent un film français, en français, avec des acteurs français et qui est une adaptation du film français Le ballon Rouge d'Albert Lamorisse. Mais rassurez vous Asiaphilie reste dans le rang, regardez qui a réalisé la chose, c'est Hou Hsiao Hsien qui est derrière la caméra et cela rattrape tout, d'une histoire d'apparence banale voire insipide il réussit à donner un film beau dans tous les sens du terme diffusant une poésie inattendue. En fait j'ai envie de dire que ce film avait tout pour être un film "français" dans le sens péjoratif du terme, c'est à dire rabachant encore les même thèmes de l'amour, du sens de la vie autour de la vie d'une famille moyenne vivant dans Paris intra muros à laquelle il est impossible de s'identifier, mais c'etait sans compter sur cette petite touche asiatique qui va faire la différence.

Hou Hsiao Hsien connait assez bien la France, en particulier Cannes vu qu'il est allé très régulièrement sur la Croisette depuis qu'il a commencé sa carrière pour présenter bon nombre de ses films. D'ailleurs dernièrement il a participé au projet Chacun son Cinéma (déjà évoqué sur ce blog) organisé par différents réalisateurs en hommage au Soixantième anniversaire du Festival de Cannes. Malgré son assez longue éxpérience de réalisateur c'etait seulement la deuxième fois qu'il filmait en dehors de son île de Taiwan et à chaque fois c'etait pour rendre un hommage, le premier : Café Lumière tourné au Japon était un hommage au réalisateur Yasujiro Ozu. Cette fois c'est au cinéma français qu'il rend hommage (notez l'ouverture d'esprit du cinéaste asiatique à la différence de certaines personnes hermétiques à ce merveilleux cinéma). En fait ce film est un projet organisé par le musée d'Orsay à l'occasion de son 20eme anniversaire et c'est donc d'une façon assez improbable que le projet a été confié à notre cher réalisateur asiatique et ce pour notre plus grand bonheur.

L'histoire peut se résumer facilement, Simon est un jeune garçon de 7 ans qui est constamment suivi par un mystérieux ballon rouge. Le film alterne alors entre scènes poétiques avec les errances aériennes et touristiques de notre ballon dans un Paris sublimé puis celles où ce dernier décide de se tourner vers le petit garçon, on retombe dans la réalité, dans le terre à terre si j'ose dire, en se penchant sur le quotidien de Simon. On découvre ainsi que sa mère est une marionnettiste debordée par la préparation de son nouveau spectacle qui a décidé d'engager Song Fang une jeune chinoise étudiante en cinéma pour l'aider à s'occuper de Simon. On découvre que tous trois habitent dans un petit appartement en plein Paris, que le père du garçon est parti s'isoler au Canada pour écrire un livre, qu'un ami du père squatte l'appart du dessous au grand desarroi de la mère qui en a marre d'assumer l'inconséquence de son mari. On apprend qu'il a une soeur dont il est très proche bien qu'elle n'habite pas la ville et qu'il aime bien jouer à la console. Mais vous allez vous dire mais de quoi parle ce film? Et bien en fait de rien ou de tout cela dépend de son point de vue, ce film montre la vie dans tout ce qu'elle a de banal, de joyeux, de contraignant et de beau finalement. La force du film est de sublimer ce quotidien, de réussir à créer une atmosphère étrange mèlée d'humanité et de poésie qui nous emporte et qui nous montre qu'il n'est nul besoin de drame pour avoir quelque chose à dire. Comme ce ballon nous sommes des témoins exterieurs captant quelques moments ephémères, c'est en fait un conte de ces petits riens qui ont quand même leur importance.

Le Voyage du Ballon Rouge c'est la rencontre du sensible et du réalisme, de la poésie et du trivial. C'est un film surprenant où le détail prend le pas sur l'intrigue, où le décor prend le pas sur les personnages, où l'image compte plus que le verbe, où le cinéma finit par se confondre avec la vie pour au final rendre un hommage vibrant aux deux (à la vie et au cinéma). C'est pour moi cela qui fait la force du film, le souhait de montrer le réel sans y rester collé, d'aborder des thèmes comme l'enfance, la mélancolie sans se laisser enfermer dans un genre, ici les réponses sont seulement esquissées, le coeur des choses n'est qu'effleuré car le film ne semble pas vouloir nous amener quelque part juste nous faire partager un moment de vie dans ce qu'elle a de banal et d'incroyable. Hou Hsiao Hsien comme le ballon qu'il filme réussit à prendre de la distance avec son sujet mais c'est finalement pour mieux l'exploiter car l'évasion poétique n'est jamais très loin de ce réel concret qu'il observe, lui permettant de conserver toujours un ton léger mais aussi sensible. D'ailleurs, mais ce n'est que ma théorie personnelle, ce film est en réalité un manuel s'adressant à nos réalisateurs français pour qu'ils apprennent à parler de ce quotidien qui leur est si cher mais sans lourdeur, ni éxagération ou pathos, simplement avec sincérité car la vie est déjà suffisamment riche en thèmes et on n'est pas obligé de recourir à tout propos au "concept" et à l'artifice, car le réalisme, au sens littéraire comme montrant le quotidien, a du bon.

Voila je dirais enfin que c'est tout simplement un film beau car simple et sincère, c'est un hommage humble au cinéma réaliste français. C'est un film ouvert et ludique où chaque spectateur retiendra ce qu'il veut. C'est une belle leçon de cinéma avec des plans renversants d'un Paris vu du ciel, mais ce n'est pas le Paris des beaux et grands batiments mais celui des petits quartiers, des toits de la ville, plus authentique et moins convenu. C'est la preuve encore une fois de l'hyper sensibilité de ce réalisateur qui sait capter des lumières, des objets, des personnages voire même des sons avec sa caméra. C'est rare qu'un réalisateur fasse passer une certaine ésthétique avant son histoire, c'est un exercice périlleux mais ici cela donne une folle légèreté à ce film qui telle une plume ou un ballon virevolte dans Paris croquant de petits portraits, des saynètes débordantes de vie grâce au formidable jeu des acteurs. La grande Juliette Binoche en tête radieuse dans son rôle de mère mais aussi le jeune Simon Iteanu impressionant de naturel. La direction des acteurs était très libre il n'y avait aucun dialogue écrit (cela contraste bien avec le souci du détail du réalisateur) mais ce choix rend le jeu dynamique et fluide totalement crédible comme le voulait certainement le réalisateur.
Pour conclure je citerai La Fontaine qui a une phrase qui, je trouve, résume très bien ce film plein de simplicité, de tendresse et de poésie :
"Je suis chose légère et vole à tout sujet;
Je vais de fleur en fleur et d'objet en objet"
Cela colle au ton du film léger et ludique qui survole son sujet pour en capter seulement quelques instants. Comme un papillon la caméra erre dans la ville pour mieux se poser et venir butiner quelques impressions de vie car comme un peintre en quelques touches Hou Hsiao Hsien réussit à englober toute une réalité. Enfin ultime argument allez le voir pour vous la jouer intello car les Cahiers du Cinéma et les Inrocks ont adoré !
Nostalgic Du Cool

Hou Hsiao Hsien connait assez bien la France, en particulier Cannes vu qu'il est allé très régulièrement sur la Croisette depuis qu'il a commencé sa carrière pour présenter bon nombre de ses films. D'ailleurs dernièrement il a participé au projet Chacun son Cinéma (déjà évoqué sur ce blog) organisé par différents réalisateurs en hommage au Soixantième anniversaire du Festival de Cannes. Malgré son assez longue éxpérience de réalisateur c'etait seulement la deuxième fois qu'il filmait en dehors de son île de Taiwan et à chaque fois c'etait pour rendre un hommage, le premier : Café Lumière tourné au Japon était un hommage au réalisateur Yasujiro Ozu. Cette fois c'est au cinéma français qu'il rend hommage (notez l'ouverture d'esprit du cinéaste asiatique à la différence de certaines personnes hermétiques à ce merveilleux cinéma). En fait ce film est un projet organisé par le musée d'Orsay à l'occasion de son 20eme anniversaire et c'est donc d'une façon assez improbable que le projet a été confié à notre cher réalisateur asiatique et ce pour notre plus grand bonheur.

L'histoire peut se résumer facilement, Simon est un jeune garçon de 7 ans qui est constamment suivi par un mystérieux ballon rouge. Le film alterne alors entre scènes poétiques avec les errances aériennes et touristiques de notre ballon dans un Paris sublimé puis celles où ce dernier décide de se tourner vers le petit garçon, on retombe dans la réalité, dans le terre à terre si j'ose dire, en se penchant sur le quotidien de Simon. On découvre ainsi que sa mère est une marionnettiste debordée par la préparation de son nouveau spectacle qui a décidé d'engager Song Fang une jeune chinoise étudiante en cinéma pour l'aider à s'occuper de Simon. On découvre que tous trois habitent dans un petit appartement en plein Paris, que le père du garçon est parti s'isoler au Canada pour écrire un livre, qu'un ami du père squatte l'appart du dessous au grand desarroi de la mère qui en a marre d'assumer l'inconséquence de son mari. On apprend qu'il a une soeur dont il est très proche bien qu'elle n'habite pas la ville et qu'il aime bien jouer à la console. Mais vous allez vous dire mais de quoi parle ce film? Et bien en fait de rien ou de tout cela dépend de son point de vue, ce film montre la vie dans tout ce qu'elle a de banal, de joyeux, de contraignant et de beau finalement. La force du film est de sublimer ce quotidien, de réussir à créer une atmosphère étrange mèlée d'humanité et de poésie qui nous emporte et qui nous montre qu'il n'est nul besoin de drame pour avoir quelque chose à dire. Comme ce ballon nous sommes des témoins exterieurs captant quelques moments ephémères, c'est en fait un conte de ces petits riens qui ont quand même leur importance.

Le Voyage du Ballon Rouge c'est la rencontre du sensible et du réalisme, de la poésie et du trivial. C'est un film surprenant où le détail prend le pas sur l'intrigue, où le décor prend le pas sur les personnages, où l'image compte plus que le verbe, où le cinéma finit par se confondre avec la vie pour au final rendre un hommage vibrant aux deux (à la vie et au cinéma). C'est pour moi cela qui fait la force du film, le souhait de montrer le réel sans y rester collé, d'aborder des thèmes comme l'enfance, la mélancolie sans se laisser enfermer dans un genre, ici les réponses sont seulement esquissées, le coeur des choses n'est qu'effleuré car le film ne semble pas vouloir nous amener quelque part juste nous faire partager un moment de vie dans ce qu'elle a de banal et d'incroyable. Hou Hsiao Hsien comme le ballon qu'il filme réussit à prendre de la distance avec son sujet mais c'est finalement pour mieux l'exploiter car l'évasion poétique n'est jamais très loin de ce réel concret qu'il observe, lui permettant de conserver toujours un ton léger mais aussi sensible. D'ailleurs, mais ce n'est que ma théorie personnelle, ce film est en réalité un manuel s'adressant à nos réalisateurs français pour qu'ils apprennent à parler de ce quotidien qui leur est si cher mais sans lourdeur, ni éxagération ou pathos, simplement avec sincérité car la vie est déjà suffisamment riche en thèmes et on n'est pas obligé de recourir à tout propos au "concept" et à l'artifice, car le réalisme, au sens littéraire comme montrant le quotidien, a du bon.

Voila je dirais enfin que c'est tout simplement un film beau car simple et sincère, c'est un hommage humble au cinéma réaliste français. C'est un film ouvert et ludique où chaque spectateur retiendra ce qu'il veut. C'est une belle leçon de cinéma avec des plans renversants d'un Paris vu du ciel, mais ce n'est pas le Paris des beaux et grands batiments mais celui des petits quartiers, des toits de la ville, plus authentique et moins convenu. C'est la preuve encore une fois de l'hyper sensibilité de ce réalisateur qui sait capter des lumières, des objets, des personnages voire même des sons avec sa caméra. C'est rare qu'un réalisateur fasse passer une certaine ésthétique avant son histoire, c'est un exercice périlleux mais ici cela donne une folle légèreté à ce film qui telle une plume ou un ballon virevolte dans Paris croquant de petits portraits, des saynètes débordantes de vie grâce au formidable jeu des acteurs. La grande Juliette Binoche en tête radieuse dans son rôle de mère mais aussi le jeune Simon Iteanu impressionant de naturel. La direction des acteurs était très libre il n'y avait aucun dialogue écrit (cela contraste bien avec le souci du détail du réalisateur) mais ce choix rend le jeu dynamique et fluide totalement crédible comme le voulait certainement le réalisateur.
Pour conclure je citerai La Fontaine qui a une phrase qui, je trouve, résume très bien ce film plein de simplicité, de tendresse et de poésie :
"Je suis chose légère et vole à tout sujet;
Je vais de fleur en fleur et d'objet en objet"
Cela colle au ton du film léger et ludique qui survole son sujet pour en capter seulement quelques instants. Comme un papillon la caméra erre dans la ville pour mieux se poser et venir butiner quelques impressions de vie car comme un peintre en quelques touches Hou Hsiao Hsien réussit à englober toute une réalité. Enfin ultime argument allez le voir pour vous la jouer intello car les Cahiers du Cinéma et les Inrocks ont adoré !
Nostalgic Du Cool