Musashi 2, Duel à Ichijoji. Ou l'accomplissement martial d'un samouraï.

Publié le par Nostalgic-du-cool

La légende de Musashi, 2ème volet. Duel à Ichijoji.

Après avoir longtemps erré, beaucoup appris et pas mal tué, Musashi est devenu un sabreur hors pair, obnubilé par son art et son perfectionnement. Il recherche des duels dans toutes les écoles ou il va, provoquant toujours les plus grands maîtres, face auxquels il se fait un nom.

Mais cette fois, suite à un quiproquo est une fronde des élèves, il est victime d’une trahison, et se retrouve confronté à toute l’école, en dessous d’un arbre magnifique…

Par ailleurs, on suit toujours les mésaventures d’Otsu, qui croise la route de son amant sans pouvoir l’arracher à sa destinée… Quand à Akemi et Oko (la mère et la fille qui avaient accueillies Musashi et Matahachi dans l’épisode 1), on les retrouve liées au jeune maître de l’école que défie le terrible samouraï…

Destins croisés, intérêt divergents…

 

Inagaki ne se départ pas de son talent pour cette suite, épisode charnière de la trilogie. La direction des acteurs est impressionnante, il faut dire qu’avec Mifune dans le rôle principal, on s’expose à de prestations de haut niveau ! Mais il ne faut pas minimiser le rôle et le talent du metteur en scène et du chef op’ qui, avec en réalité très peu d’événementiel arrivent à créer un film haletant, pas vraiment plein de suspense puisqu’on se doute bien que le grand samouraï va gagner, mais surtout intéressant du point de vue de la création des personnages.

Dans le premier volet, on avait assisté à la genèse du personnage, à sa création brute, à partir de la glaise de Takezo. Ici c’est Musashi qui parle en permanence, même si on craint (espère ?) que Takezo ressurgisse lorsqu’il est en face d’Otsu. Ici c’est le samouraï, l’homme à l’âme aussi tranchante et inaltérable que le sabre qui s’exprime. Ainsi, sans qu’on la voie vraiment en tant que processus, on assiste à la transformation de l’homme. Inagaki a en effet pris le parti d’éclipser toute une partie de la vie du guerrier, ses premiers combats, sa véritable formation de samouraï. On reprend son histoire lors du duel qui fit de lui une légende vivante. Le duel qui donne son nom au film, celui qui se déroula sous le grand pin d’Ichijoji. La mutation du personnage est donc expulser du film. Processus atypique dans un film (on songe par exemple, dans un tout autre registre, à la métamorphose de Anakin dans Starwars, ou celle de son fils, Luke, dans la suite de l’hexalogie) où d’habitude les réalisateurs aiment à montrer les soubresauts de la conscience, les dilemmes, les doutes qui hante le personnage… La, Inagaki ne fait que très rapidement évoquer ces choses. Musashi ne doute presque pas, il a déjà choisit sa voie, et ce ne sont que des ersatz de tentations passés qui s’offre à ses yeux. Bien qu’il aime Otsu, il sait qu’il doit persévérer dans la Voie qui est la sienne, que c’est en quelque sorte son destin (bien que ce soit lui qui l’est choisit), et il doit la suivre sans regret ni amertume. Etrange philosophie de notre point de vu, mais qui semble accepter par Otsu et par tous ceux qui le côtoient. On l’aura peut être compris lors du résumé, malgré une trame scénaristique faible, l’histoire raconté est dense. Musashi a beau être le personnage central, il n’est pas le seul auquel s’intéresse Inagaki. En effet, comme déjà dit plus haut, Otsu est toujours présente dans la vie du héros, côtoyée et concurrencée par Akemi (la fille qui l’avait accueillie avec sa mère et qu’il avait rejeté alors qu’elle tentait de le séduire dans sa grange…). D’Akemi on passe à sa mère et à son beau père, marchand peu scrupuleux qui veut la marier… au maître d’arme que veut affronter Musashi, et qui en est éperdument amoureux, ce qui lui fait manquer de lucidité à un moment critique, laissant ainsi son honneur aux mains de ses subalternes, qui le piétine avec autant de douceur qu’un troupeau de buffle. La boucle est bouclé, entre le samouraï, les femmes qui le suivent, ses ennemis et anciens amis (oui, en effet, j’oubliais, mais Matahachi vit chez Akemi, rongé par le remord).

Les scènes se succédent et on découvre la vie que mène chacun, ce qu’il est devenu, ce qu’il reste de son passé et ce qu’il projette pour l’avenir. Comme tous les films, mais peut être un peu plus, celui ci montre donc aussi de nombreux des aspects sociaux de la société japonaise du XVIIème siècle à travers les portraits des femmes (amoureuse transie et naïve, amante sans illusion, marchand bourgeois, femme entrepreneuse, villageois-guerrier qui dépérit) et d’hommes (vus précédemment). Musashi est le seul personnage lumineux, le seul qui ne semble pas traversé de questions, de problèmes, il sait ou aller, il sait quoi faire. Il semble en complet décalage avec la société, il semble exclu de la nouvelle ère qui s’ouvre. En effet, l’ère Tokugawa est une ère sans guerre, une ère de paix et de marchand, pas une époque de combats épiques ni d’amour passionnés. La « naissance » de Musashi au tout début du shogunat Tokugawa (lors de la bataille de Sekigahara) apparaît comme un paradoxe. Comment le plus grand samouraï de toute l’histoire du Japon a-t-il fait pour exister dans ce siècle. C’est un sujet de réflexion intéressant, auquel je n’ai pas de réponse.

J’ai dit que ce film était charnière. Je me doit de justifier cette assertion jusque la plus rhétorique qu’autre chose (et oui, film charnière dans une trilogie, quoi de plus plat et entendu), et je le fais : La mise en place du personnage de Sasaki Kojiro (qu’il ne battra qu’en 1612, soit 8 ans après l’épisode dont parle le film) est bien un aperçu d’un autre combat très célèbre, dont nous aurons l’occasion de reparlé.

Revenons au temps présent. Le sujet du film, l’événement qui fait titre est le duel à Ichijoji. Après avoir déclaré un duel au maître de l’école Yoshioka, il le bat, puis bat son frère qui voulait le venger. Déshonorés, sans maître, les membres de l’école vont demander un troisième duel, provoquant Musashi en tentant de le ridiculiser. Mais ils vont cette fois ci mettre toutes les chances de leur coté, en venant à 80. Apercevant de loin la trahison, Musashi aura le temps d’en tuer une petite vingtaine, avant de fuir pour sauver sa vie. C’est cet épisode qui est le plus décrit dans le film, bien qu’il n’occupe pas une place très importante, tant les histoires parallèles sont traités en profondeurs sans pour autant éclater » le film.

 

De quoi n’ais-je pas parler… les acteurs sont bons, le montage aussi, les réalisateur réussi des plans assez exceptionnels lors des combats, il n’use pas de symbolisme trop facile ou d’une interprétation convenue à l’avance et annoncée (Neige lors du deuxième duel, …), l’histoire est intéressante (si tant est qu’on a aimé le premier épisode), la colorisation assez bonne pour l’époque (1955) voila, je crois que c’est résumé.

Un monument du Japon raconté par un monstre du cinéma nippon. La suite à venir.

 

A noter, le film est sortit en 1955 au Japon, en 1967 aux USA, et en… 1993 en France !

Carcharoth



Publié dans Japon

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H
Grand film !<br /> Super tous ces renseignements !!!
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