Friend, "Le Il était une fois en Amérique" à la sauce Coréenne (Kwak Kyung Taek).

Publié le par Nostalgic-du-cool

Friend (2001), à ne pas confondre avec la série américaine, est un film Coréen retraçant le parcours de 4 jeunes amis dans les années 70.

 

 

Il s'agit ici Du film Coréen de gangster. Le film référence (pour moi en tous cas). Tiré de la vie du réalisateur, l'histoire tragique de ces quatre jeunes gens est un morceau de la Corée de ces 20 dernières années, le portrait d'une jeunesse et d'une génération à travers un thriller mafieux.

Kwak Kyung Taek écrit et réalise là un film intense, porté par un quatuor d'artiste virtuoses:

-Yoo Ho Sung, Jang Dong_Kun, Seo Tae Hwa, Jeong Wung-Teak.

 

Tous issus de milieu différents (Mafia, Préparateur mortuaire, milieu instruit, bonne famille), ces quatre personnages sont filmés à quatre époques de leur vie: Leur enfance, innocente, pleine de rêves et d'amitié, leur adolescence au collège, puis deux périodes plus approfondies: la fin du lycée, lorsque les deux plus instruit vont à l'université et partent, et que les deux autres deviennent caïds, puis mafieux; et enfin, l'age adulte: Les deux mafieux sont dans deux bandes rivales, les deux autres sont installés et vivent leur vie.

Enorme succès au  box office Coréen, sa sortie est restée assez discrète en France, même si la vague "asiaphile" commençait à enfler...

 

La fresque qui se dessine devant nous durant tout le film, et que l'on voit encore sur nos pupilles longtemps après la fin du film est énorme, somptueuse, géniale de complexité, de maturité, de puissance, d'émotions.

Quatre époques pour quatre amis dont l'amitié ne s'effaça jamais totalement, même lors de la dernière scène, tout semble être pardonné, expliqué, compris.

L'enfance; période oh combien propice à la naissance d'une amitié, à son développement: les souvenirs qui en émanent, les moments passés ensemble, les rires et les rêves partagés, l'innocence des esprits enfantin, qui ne voient pas les barrières sociales ni les clivages conventionnels qui barrent si vite la route à l'âge adulte... C’est ainsi qu’un fils de préparateur mortuaire, dont le père est nécessairement mis à l’écart peut être le meilleur ami d’un enfant côtoyant tous les jour la mafia. C'est ainsi qu'ils peuvent se demander qui d'un nageur ou d'une tortue géante nage le plus vite, sur quelle distance, selon la race de la tortue...

 A l'adolescence déjà, les rêves sont finis, les différences se créent, le statut social est établi, ils ne peuvent plus sortir de leur "carcan déterministe". Tout semble déjà joué: Le fils de mafieux est un caïd, celui du préparateur mortuaire, reniant le métier et le rôle de son père, se place sous son aile et rêve de l'imiter, les deux autres semblent avoir choisi (ou été choisis par) la voie scolaire pour monter  (Boudon ou Bourdieu, choisissez votre analyste*).

 

Fin du lycée, période clé: L'entrée dans la mafia est proche, et la tête du clan leur semble promise. Pour les deux autres, ce sont les amphis de l'université qui s'ouvrent, et la formidable expansion de la Corée qui leur est offerte.

 

Adultes, ces hommes, toujours amis, mais de loin. Les intellectuels du groupe se sont installés, l'un est parti étudié aux USA, l'autre vit paisiblement. Ce n'est pas tout à fait pareil pour les deux voyous, qui sont chacun à la tête d'une bande rivale. Même s'il y a toujours de l'amitié en fond, ils sont maintenant aussi rivaux, et leurs factions ne sont pas alliés, loin de la. Une guerre d'influence commence alors... La fin ne peut en être que tragique.

 

 

Au travers de ce film, l'auteur, qui à vécu ses évemenements de l'intérieur, retrace l'histoire récente de son pays. On évoque souvent à propos de la Corée des années 70-80 puis 90 son fabuleux développement économique mais aussi humain (le fameaux développement en vol d'oiseau). Ce sont les deux "intellectuels" du groupe: l'un d'eux part aux USA, symbole s'il en est de réussite sociale pour un pays qui aprés la guerre de Corée (1950-53) était presque considéré comme appartenant au tier monde. Mais on oublie souvent de présenter la face sombre de ce progrès: De très nombreux exclus, un système social d'intégration défaillant, un monde brutal, une socièté fermée. Et une économie parallèle puissante et attractive pour tous les reclassés, les recalés de l'occidentalisation Coréenne.

 

 

Tout est donc dans ce film pour expliquer le sucés: l'émotion, les acteurs, le réalisateur, la musique, l'histoire qui se mêle à l'Histoire... Un drame potentiellement proche de nombreux coréens.

Voila.

 

 

 

Carcharoth

 

 

 *Raymond Boudon et Pierre Bourdieu ont tous deux développés des théories sur la reproduction sociale: Le premier insistait sur le choix rationnel des individus (un pauvre choisis d'abandonner vite l'école car il n'est pas sur de réussir et n'en a pas les moyens, alors que les riches ont la culture necessaire et ont le soutien finnacier nécessaire: néanmoins les pauvres peuvent réussir à condition de tout mettre en oeuvre: c'est un choix stratégique; Bourdieu insiste lui sur le déterminisme social, avec son concept d'habitus, et ses réflexions sur le capital culturel, social, financier...Il n'y a donc pas de choix, les individus pour la plupart sont contraints.

 

 

 



Publié dans Corée

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C
un petit commentaire sur cet article que je n'avais pas vu: effectivement, film magnifique sur ces quatre personnages aux destins différents.<br /> Rien à dire de plus que la critique même si elle est un peu lapidaire. Jang Dong Gun est toujours aussi bon, même s'il a souvent des rôles de rebelles ! La mise en scène est intéressante, avec les retours en arrière dans le passé. J'ai particulièrement aimé le personnage le plus impliqué dans la mafia, qui est paradoxalement le plus dangereux mais aussi le plus émouvant.<br /> Bref, un excellent film, à voir !
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