Sunny, Kang Hyung-Chul,Corée, 2011
Sunny est le plus gros succès au box-office coréen de l'année 2011, et le 11ème de tous les temps en Corée. Il s'agit d'une comédie dramatique qui joue sur le thème classique des retrouvailles d'un groupe de jeunes filles, amies au lycée et qui se sont perdues de vue depuis. Un incident tragique les pousse à se réunir à nouveau...
La partie de l'iceberg du cinéma coréen que le public avertit (lui même partie de l'iceberg des spectateurs français) voit sur ses écrans noirs est en ce moment le plus souvent constitué de thriller noir et violents, ou de films de Kim Ki Duk. Je n'ai rien contre les uns et les autres (au contraire!) mais le cinéma coréen, ce n'est pas cela loin sans faut. Le cinéma populaire est plutôt constitué de films romantiques, très commerciaux à l'image des dramas qui envahissent tous les écrans tv du pays. Les hits des salles obscures du pays du matin calme ne sont souvent pas les films choisis pour être projetés chez nous.
Sunny fait parti de ceux la. Il se rapproche en effet plus d'une série pour adolescente condensée en un film qu'autre chose. Pour autant, je m'attendais à une guimauve mièvre et douceâtre, ce n'est pas exactement le cas.
Si ce film est très américanisé, romantique, avec presque tous les poncifs du genre, il n'en demeure pas moins un réjouissant moment, avec pas mal d’humour, quelques scènes dont on ne peut que rire, puis être ému et devant lesquelles vraiment on se divertit. A ce niveau la, c'est de très bonne qualité et le spectateur n'est pas pris pour une bille.
Par contre, il est un point négatif auquel j'ai été sensible. Ce film se déroule pour une bonne moitié durant les révoltes étudiante du début des années 1980, alors que la Corée du Sud était sous le joug d'une dictature militaire et que les étudiants prenaient littéralement les armes pour renverser ce pouvoir totalitaire. Ici ces évènements sont présentés de façon comique, très légère, sans aucun arrière plan ni critique. Le frère de l'héroïne est un jeune militant et étudiant, mais il est surtout présenté comme un petit branleur donneur de leçons, jusqu'au jour où il cause d'énormes problèmes à ses parents parce qu'ils distribue des tracts anti-gouvernementaux. De même les manifestations, qui étaient en réalité très violentes et souvent meurtrières sont ici présentées comme de gentilles batailles de rue entre gentlemen. En tous cas les deux gangs rivaux de jeunes filles qui s'y affrontent (sic!) n'ont rien de dangereuses terroristes ou d'horribles tortionnaires, et les « combats » ne ressemblent pas tout à fait à ceux que l'on peut voir dans les vidéos d'archives dispnibles aujourd'hui...
Bref, il est bien dommage que toute cette partie pourtant intéressante et encore fraiche dans la mémoire collective coréenne soit passée au sucre glace et enrobée dans un emballage de bonbon bien rose ! Quant à savoir s'il s'agit de révisionnisme, d'auto-censure ou simplement de désintérêt pour le sujet, je préfère ne pas trancher et laisse aux spectateurs le choix de se faire un avis, après s'être renseigné sur le sujet (en lisant un peu sur les révoltes de Kwangju par exemple).
Donc, Sunny est un divertissement réjouissant, léger, bien mené, avec des actrices de talent, une bande son sympa mais qui ne restera pas dans les annales du cinéma pour son engagement et son intelligence. A voir un jour de pluie et de déprime...
Carcharoth