Onibaba, un film qui se ressent plus qu'il ne se critiqe..

Publié le par Nostalgic-du-cool

cycle 
 
 cinema japonais

Onibaba, Kaneto Shindo, Japon, 1965.



  Onibaba est un terme désignant la femme-démon. Le film de Kaneto Shindo, repéré en Europe peu de temps auparavant grâce à l'Ile Nue, raconte l'histoire simple de deux femmes vivant seule dans un marais, et survivant grâce au trafic et au meurtre. Le retour d'un homme enrôlé de force dans l'armée va bouleverser leur vie et mettre en péril le frêle équilibre qui régnait.

  Onibaba fait parti de ces films dont on ne sait trop que dire après les avoir vu. C'est un film un peu sauvage, avec une intrigue minimaliste, dans un décor monotone, filmé dans un noir et blanc très soigné (vraiment magnifique) qui se ressent plus qu'il ne s'analyse ou ne se critique.
Il parle de la sexulaité, du désir féminin, de la jalousie, y mêle de vieilles légendes rurales, une guerre qui paralyse le pays, un trou très noir et profond.

  Tout gravite autour de ce trou. Le film commence par un plan fixe sur sa noirceur, puit une voix off le décrit. Les cadavres de deux soldats y sont ensuite jetés après avoir été depeçés par la vieille femme et sa bru. C'est dans ce trou que tombe le mystérieux samouraï maudit, c'est autour de ce trou que cour la bru après avoir appris la mort de son époux à la guerre.

  C'est vraiment un film étrange, sans genre précis, voguant entre l'horreur, l'érotique (pour l'époque, autant dire qu'aujourd'hui la charge sexuelle n'est plus aussi fortement perçue, même si elle avait fait interdire et censurer le film dans bien des pays à l'époque), l'historique, le naturaliste.
Onibaba ne parle pas vraiment de la guerre (qui sépare l'époque Kamakura et Muromachi), bien que la situation du film en découle directement: les deux femmes, affamées par la guerre survivent en tuant des soldats isolés puis en revandant leur équipement à un marchand spécialisé dans ce genre d'affaires qui semblent florissantes dans le coin. C'est aussi ce conflit qui a tué le mari de la plus jeune des femme et la pousse dans les bras de Hachi, seul rescapé masculin disponible. Enfin, c'est cette guerre qui rend possible l'improbable rencontre entre une paysanne et un samouraï de haut rang.


 Je ne sais pas vraiment ce que l'on peut dire d'autre. Hachi (l'homme rescapé) arrive, il apprend la mort du fils/mari aux deux femmes puis regagne sa hutte. A partir de la, il va se rapprocher de la plus jeune des femme, demander à la vieille de la laisser se marier avec lui. N'y tenant plus, les deux jeunes gens se rencontrent en cachette, font l'amour sauvagement. Ils se retrouvent ensuite tous le ssoirs, et le jour si possible. Mais la vieille se doute de quelquechose et les épie. On ne sait s'il s'agit de jalousie (elle demande à Hachi de lui faire aussi l'amour), de haine à cause de la mort de son fils ou d'un simple instinct de survie (sans la jeune femme, elle n'arrivera plus à tuer les soldats perdus) mais elle réprouve cette situation et tente de dissuader la jeune femme. Elle commence par lui raconter des fables bouddhiste sur les péchês et l'enfer, puis récupérant le masque du samouraï "maudit" elle entrave le chemin entre leur hutte et celle de Hachi en se faisant passer pour un démon. Hors un soir le masque reste collé à la peau de son visage. Elle est obligé de solliciter l'aide de sa bru pour le retirer. Celle ci, haineuse à cause de la manipulation de sa belle-mère la délivre tout de même, mais s'enfuit en courant en voyant le visage purulent de la vieille femme libéré de son masque. Malédiction ou simple brulûre sur la peau, on ne sait, mais la vision est atroce.
L'amour, ou plutot le désir (car la différenciation est faite: les deux jeunes gens éprouvent le besoin de faire l'amour, ils ne s'aiment pas vraiment. Dans ces temps de guerre et de disette, ils expriment un nouveau besoin, différent du simple triptyque manger-boire-dormir) entre Hachi et la jeune femme est plus ou moins fort selon le rythme du bruissement des roseaux, selon la force du vent. Par son primitisme, la situation fait un peu penser à la Guerre du Feu d'Annaud.


  Voila, Onibaba n'est pas un de ces films qu'on a envie de décortiquer, d'analyser. C'est un film qu'on sent, dans une odeur mélant transpiration, vase et chair morte, avec un vent frais sur la figure, ou dans le brûlant été nippon. L'érostisme se dégage plus des scènes habillées que des quelques scènes d'amour, très chaste et pudique par rapport à ce que l'on peut voir aujourd'hui dans n'importe quel film. Kaneto Shindo filmait alors sa compagne (Nobuko Otawa) avec un talent rare, faisant ressortir toute sa sensualité dans les situations les moins propices. Celle qui fut aussi sa muse irradie dans ce film d'une chaleur et d'une présence surprenante. La moindre de ses courbes fait sensation dans les plans, elle submerge tout lorsqu'elle court, de nuit, dans le marécage, entre les roseaux, dans le bruit des grillons et qu'elle se jette à peine arrivée sur Hachi dans une rage frénétique.

Onibaba dégage donc une énetgie vitale, "naturelle" très forte, très basique, puissante et rustique, parlant de mort et de vie avec simplicité et chaleur. Mais l'instinct n'est il pas "la forme la plus avancée de l'intelligence" après tout ?





Fiche Imdb d'Onibaba.


Carcharoth.
 


Publié dans Japon

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