Flamme de mon amour, Kenji Mizoguchi.
Un vieux film (1949), d'un réalisateur considéré comme le pendant féministe de Kurosawa, que l'on voit aussi en tant que grand maître du cinéma nippon. Mizoguchi fera sûrement l'objet d'un article biographique, pour que son oeuvre paraisse plus transparente à ceux qui s'y intéresseraient. Cette oeuvre, une des dernières du réalisateur (sur prés de 100 oeuvres), est tournée après la guerre, pendant l'occupation américaine qui tolère la production cinématographique, à condition qu'elle encourage et montre des mouvements de démocratisations et pacifistes. C'est ce que fait ici Mizoguchi. Son film, qui ouvre selon certain la période la plus intense de son cinéma, raconte le combat d'une campagnarde juste avant l'adoption d'une constitution (la première) par le pays en 1889.
Kinuyo Tanaka joue cette paysanne cultivée qui vient s'établir à Tokyo, quittant sa famille qui a vendu sa servante (Chiyo) à un tenancier de bordel. Elle cherche à y trouver l'homme qu'elle a aimé (Tochiko), mais qui, n'y tenant plus, a lui aussi quitté sa province pour participer à la lutte pour la liberté et suivre des études. Elle le retrouve par l'intermédiaire d'un professeur: Mr Omoi, qui est aussi l'un des chefs de file du parti libéral. Elle entre donc dans cet univers tout à fait étranger, mais auquel elle s'habitue très vite et dans lequel elle se plait. Il apparaît cependant que son ancien amant ne peut et ne veut pas vraiment l'héberger, et ce pour des raisons étranges. Omoi lui propose alors une place dans son journal, et de l'héberger. A la faveur de lutte, d'articles écrits ensemble et du temps, naît entre les deux personnages de l'affection, puis de l'amour, et ce d'autant plus que l'ancien ami de Eiko a été renvoyé du parti et de l'école où il se trouvait pour trahison auprès des militaires et du gouvernement. Au cours d'une grève, Omoï et ses amis vont soutenir les ouvriers, qui menacent d'attaquer un bâtiment ou sont enfermés et exploités des femmes, dont Chiyo. Cette dernière, punie, met le feu à la fabrique et s'enfuie: Elle est recueillie par Eiko, qui la prend comme maîtresse de maison chez Omoi, chez qui elle vit.
Elle est par la suite emprisonnée, à cause de se activités plus ou moins légales, en marge du mouvement libéral (qui vient de se sciender en deux, par une habile manoeuvre gouvernementale). Elle milite notamment pour l'émancipation des femmes, leurs droits, etc...
Son couple se renforce avec Kentaro Omoi, et ils s'affichent dorénavant ensemble. Mais elle va vite découvrir que ce contre quoi elle lutte à longueur de journée, à longueur d'articles et de discours, est aussi présent dans son couple: Omoi la trompe avec Chiyo, et se fiche du combat des femmes: Lorsque la constitution est votée, c'est son nom qui est cité, c'est lui qui accéde à un poste dans une chambre (premier député libéral), et aucune mention n'est faite du droit des femmes, ou d'une quelconque amélioration de leur condition. Devant la réaction de Chiyo, elle comprend qu'elle a fait fausse route: elle quitte donc Omoi, sans vraiment lui en vouloir (consciente de toute la machinerie ancestrale et traditionnelle dans laquelle Omoi est resté dans ses conceptions des femmes) et repart chez elle fonder une école pour fille, afin de les instruire, car on ne peut pas se battre pour leur droit sans qu'elles le réclame et soient capable de les assumer.
Vibrante fresque féministe du japon du début de l'ère Meiji, alors que le pays s'est largement ouvert au commerce extérieur et commence à profiter de ses exportations de soie. Il règne une grande effervescence dans le pays, et notamment dans la capitale, et de nombreux changements politiques s'amorcent. Déjà on perçoit l'omnipotence des militaires...
Une constitution est tout de même accepté par l'empereur, pour calmer les esprit, qui ne fait que reconnaître l'existence d'une chambre élue mais sans réel pouvoir, et qui préserve le pouvoir très autoritaire de l'empereur.
Film intemporel (on retrouve en effet de très nombreux problèmes dénoncés par ce film dans notre société, il a pourtant été tourné en 1949, et portant sur une époque encore plus reculé, et dans un pays que l'on considère toujours comme traditionnel, et ou la femme serait soumise, ce qui n'est d'ailleurs quand parti vrai et relève plus des préjugés sur la culture asiatique...Surtout pour cette époque au Japon...) et vibrant, Flamme de mon amour fait parti de ces classiques des grands maîtres japonais qu'il faut voir: les techniques employés ne sont pas les même qu'aujourd'hui, la façon de filmé, le matériel employé, la façon de créer des effets ou de jouer nous étonnent d'autant plus aujourd'hui qu'on est plus habitués à les voir.
Un grand film (d'aprés le roman de Kogo Noda), qui ouvre peut être l'apogée de Mizoguchi.
Carcharoth